SAME SAME AND NOT DIFFERENT - Il était le directeur de cabinet du Premier ministre Dominique de Villepin, lorsque celui-ci a dû reculer, au bout d'un intense conflit social et d'un féroce débat politique, sur la réforme du CPE en 2006. Un texte sur lequel Bruno le Maire avait "travaillé durant plus d'une année", et qui reste aujourd'hui le plus gros "échec" de sa carrière. Une bérézina, surtout, qui lui rappelle fortement la loi Travail du gouvernement Hollande, passée aux forceps du 49.3 et finalement promulguée début août.
Dans une interview au Figaro mercredi 17 août, le candidat à la primaire de la droite fait donc cette comparaison peu avantageuse pour l'exécutif socialiste, estimant que c'est notamment dans l'élaboration des textes, en amont, que se trouvent les raisons de l'impopularité commune à ces deux réformes :
"La loi EL Khomri a effectivement été conçue avec les mêmes ingrédients que le CPE : beaucoup d'agitation, de la précipitation, une accumulation d'erreurs... Depuis l'échec du CPE, j'ai appris que les grandes décisions politiques ne pouvaient aboutir que si elles étaient portées par une vraie légitimité démocratique et qu'elles étaient convenablement expliquées. Il doit y avoir une écoute avant pour comprendre et un dialogue pendant pour déminer.
"
Au sujet du CPE, il regrette encore que ses "bonnes intentions" soient "malheureusement restées incomprises" à l'époque. "Après les Français qui sont descendus dans la rue en masse, la majorité nous a finalement lâché. Tout le monde était donc contre nous", commente-t-il dix ans après. La CGT et les frondeurs du PS ne diraient certainement pas grand chose de différent aujourd'hui...
Le gouvernement lui-même, par la voix de Manuel Valls et Myriam El Khomri, avait reconnu certaines "erreurs" : un manque de "concertation" avec les partenaires sociaux pour élaborer le texte et un déficit de "communication", dans "l'explication" et la "présentation" des objectifs de la loi Travail. Bruno Le Maire y ajoute donc la question de "légitimité démocratique". Hollande et Valls ont particulièrement été critiqués pour vouloir mener cette réforme "de droite" plutôt que "de gauche" et surtout absente du programme présidentiel de 2012.
Ne parlant plus de la loi Travail mais du CPE, Bruno Le Maire appuie un peu plus encore sur ce point :
"Aujourd'hui, on réfléchit à toute vitesse, et on prend des décisions hâtives qui ne sont ni pertinentes ni légitimes. Il faut écouter avant de décider quoi que ce soit mais surtout il faut être clair dès le départ c'est-à-dire au moment de l'élection. C'est une question de respect de l'électeur qui n'accepte plus d'être mis devant le fait accompli. [...] Une décision de fond prise en cours de mandat et ne correspondant pas aux engagements électoraux sera toujours vécue comme injuste. Le CPE était perçu comme injuste et stigmatisant, c'est pour cela qu'il a été aussi massivement rejeté...
"
Un rappel de l'élément de langage favori de TOUS les candidats à la primaire de la droite : "Tout dire avant l'élection pour tout faire après". Bruno Le Maire n'est d'ailleurs pas le premier ténor de la droite à établir la comparaison loi Travail-CPE. En mars, François Fillon disait déjà que la situation des deux projets de loi était "exactement la même" : un an avant la présidentielle, "une réforme annoncée de manière brutale, sans aucun travail préparatoire pour trouver des appuis dans le champ social et avec des divisions dans la majorité".
Myriam El Khomri, pour sa part, avait vivement rejeté ce rapprochement : "On fait un parallèle entre le CPE et ma loi, ce n'est absolument pas la même chose", avait-elle fait valoir, indiquant avoir elle "aussi" manifesté contre le CPE parce qu'il "s'agissait d'un contrat et d'un salaire au rabais en direction des jeunes".