Depuis dimanche, et le basculement de l'Espagne dans le camp conservateur, seuls trois pays européens sur 27 sont gouvernés par des majorités de gauche (Slovénie, Danemark et Chypre). Alors que le système libéral vit une crise majeure, pourquoi le Vieux continent penche-t-il, scrutin après scrutin, plus que jamais à droite ? Le Lab tente de répondre à cette question.
La droite a mieux compris notre époque
Sur Le Monde
Linguiste et philosophe italien, Raffaele Simone est l'auteur d'un essai de référence sur la droitisation de l'Europe, Le Monstre doux. Dans un entretien accordé en 2010 au journal Le Monde, il explique que la gauche n'est plus porteuse de projet et qu'en face d'elle, la droite a compris notre époque consommatrice, individualiste. Elle sait se montrer pragmatique et infantiliser ses électeurs. Elle l'emporte parce qu'elle flatte les intérêts immédiats des individus, ajoute, critique, l'intellectuel.
EXTRAIT
Les régimes s'appuient sur une droite anonyme et diffuse associée au grand capital national et international, plus proche des milieux financiers qu'industriels, puissante dans les médias, intéressée à l'expansion de la consommation et du divertissement qui lui semblent la véritable mission de la modernité, décidée à réduire le contrôle de l'Etat et les services publics, rétive à la lenteur de la prise de décision démocratique, méprisant la vie intellectuelle et la recherche, développant une idéologie de la réussite individuelle, cherchant à museler son opposition, violente à l'égard des minorités, populiste au sens où elle contourne la démocratie au nom de ce que "veut le peuple".
La gauche ne fait que copier la droite
Sur Le Nouvel Obs
Dans une analyse que Le Lab a trouvé très pertinente, Le Nouvel Obs revient lundi, sur son site, sur la défaite de Zapatero aux élections législatives espagnoles et se demande pourquoi la gauche ne parvient pas à accéder ou rester au pouvoir. Selon l'hebdomadaire, la gauche européenne a trop tendance à copier les réponses de la droite : face à la crise, elle ne propose que de la rigueur light. Pire, les différentes gauches européennes n'ont pas su s'allier.
EXTRAIT
Pis : alors que la réponse socialiste , historiquement internationaliste, postule une réponse transnationale à des problèmes - financiarisation de l’économie, sécurité, défense de l’environnement, qui par nature ignorent les frontières, les gouvernements sociaux-démocrates ou travaillistes européens ont tous répondu à la crise par des solutions nationales. Chacun pour soi.
Flexibilité du travail extrême et fiscalité inique au Royaume-Uni, super-rigueur salariale et remodelage de la protection sociale afin de préserver sa sacro-sainte compétitivité en Allemagne, rigueur de "gauche" qui ajoutée à la rigueur "de droite" ruine sans guérir, du Portugal à la Grèce : aux coups de butoir du capitalisme mondialisé, les sociaux-démocrates ont répondu par des stratégies égoïstes.
La droite a le calendrier de son côté...
"Time is on my side" (Le temps est mon allié) chantaient les Rolling Stones en 1964. Cette chanson pourrait devenir l’hymne de la droite européenne tant le hasard du calendrier électoral lui a bénéficié. En temps de crise, la prime au candidat sortant n’existe plus (lire sur ce sujet : Espagne, un avertissement pour Sarkozy?) et les principales victimes en ont été les leaders de gauche.
- Royaume-Uni en mai 2010 : élection du conservateur David Cameron contre le travailliste sortant Gordon Brown.
- Irlande en novembre 2010 : élection du conservateur Enda Kenny contre le Premier ministre sortant de centre-gauche Brian Cowen.
- Portugal en mars 2011 : élection de Pedro Passos Coelho, un libéral centriste, contre le Premier ministre socialiste sortant José Socrates.
- Grèce, le 10 novembre 2011 : Lucas Papademos, l'ancien vice-président de la BCE de droite, a été désigné Premier ministre après la démission du socialiste Georges Papandréou.
- Espagne le 20 novembre 2011 : élection de Mariano Rajoi, conservateur, contre le Premier ministre sortant socialiste José Luis Zapatero.
Carte : la droite est partout
Sur Theguardian
Dans l'Europe des 27, seuls la Slovénie, Chypre et le Danemark sont aujourd'hui dirigés par la gauche. Et encore, la droite est donnée gagnante aux élections législatives slovènes qui auront lieu le 4 décembre prochain.
Il y a quelques temps, le quotidien britannique le Guardian avait réalisé une infographie, montrant, année après année, l'ampleur prise par la vague bleue sur le Vieux continent. Voir la carte ici.
Attention, la carte du Guardian ne prend pas (encore) en compte le basculement à droite de l'Espagne et de la Grèce...
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