Pourquoi la nouvelle version de la taxe à 75% sera difficile à élaborer

Publié à 16h43, le 30 décembre 2012 , Modifié à 17h01, le 30 décembre 2012

Pourquoi la nouvelle version de la taxe à 75% sera difficile à élaborer
(Maxppp)

Le Conseil constitutionnel a dit "non"à la taxe à 75%. Et maintenant? Le gouvernement souhaite proposer un "nouveau dispositif" au cours de l'année 2013, la mesure prendrait alors effet avec un an de retard. Mais encore faut-il réussir à corriger les griefs reprochés par le Conseil constitutionnel sans dénaturer la taxe.

En apparence, l'erreur faite par le gouvernement est simple à comprendre : l'impôt sur le revenu est calculé sur la base du foyer fiscal. La taxe à 75% sur les revenus annuels de plus d'un million d'euros touchait quant à elle les individus. Résultat, selon la répartition des revenus dans un couple, les foyers étaient imposés de manière inégalitaire [>> plus de détails par ici].

Fastoche, se dit-on alors. Changeons le mot "individu" par "foyer fiscal" dans la loi et le tour est joué. C'est d'ailleurs le message que la majorité veut faire passer pour montrer qu'elle n'est pas en difficulté. A l'image d'Olivier Faure, député très proche de Jean-Marc Ayrault, le 29 décembre sur BFMTV :

Le Conseil constitutionnel a simplement relevé le fait que, juridiquement, on assied l’impôt, non pas sur les personnes physiques, mais sur les foyers fiscaux. Là où on touchait les individus, il fallait toucher les foyers.

Il suffira de représenter un texte dans le cadre de la prochaine loi de finances rectificatives pour corriger cette erreur.

(images BFMTV)

Jean-Marc Ayrault est également intervenu directement pour assurer que la taxe sera représentée en 2013. Et il n'a pas manqué de rappeler au passage, à ceux qui craignent que cette mesure ne fasse fuir les "grandes fortunes", qu'elle ne concerne, au final, pas grand monde :

Reste cette mesure, que certains ont qualifié de symbolique, qui concerne 2.000 foyers fiscaux peut-être mais qui symbolise la volonté de justice fiscale du gouvernement. Donc cette mesure sera rétablie.

Sauf que, comme l'a souligné notre éditorialiste Olivier Duhamel dès l'annonce du Conseil constitutionnel, remplacer le mot "individu" par "foyer fiscal" dans la loi changerait totalement la donne. Et notamment le nombre de personnes concernées.

Lorsque François Hollande a lancé cette promesse le 27 février, en pleine campagne, beaucoup s'étaient interrogés sur ce point. Ceux-là raisonnaient alors en "foyers fiscaux" et non en "individus". Samuel Laurent l'avait  décortiqué pour Le Monde : selon les estimations, le nombre de foyers fiscaux concernés oscillait entre 7.000 et 30.000.

C'est l'actuel ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, qui donnait cette fourchette. Le secrétaire national du Syndicat unifié des impôts (Snuip), Vincent Drezet, parlait quant à lui de 15.000 à 20.000 foyers.

Une fois passé à un impôt sur les "individus", et non sur les conjoints, le nombre de personnes concernées a baissé, pour entrer dans une fourchette de 1.200 à 3000 personnes.

>> Jean-Marc Ayrault se trompe donc, au mieux dans les termes, au pire dans les estimations, en parlant de "2000 foyers fiscaux" touchés.

Comme le souligne le Journal du Dimanche ce 29 décembre, il sera difficile politiquement de faire passer ce "boom" des taxés. Pour s'en sortir, et garantir "l'esprit" de la taxe à 75%, le gouvernement va devoir trouver une forme différente et bien plus complexe qu'un simple changement de terme.

A lire également sur le sujet :

>> Dans le JDD : les premières options envisagées par le gouvernement pour présenter une nouvelle version de la "super-taxe"

>> Sur le Huffington Post : l'analyse de Guy Carcassonne sur la décision du Conseil constitutionnel

>> Sur le blog d'Authueil : son analyse sur le risque confiscatoire d'une telle taxe

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