Il fut un temps (pas si lointain) où le PS était globalement favorable au retrait de son candidat si cela pouvait empêcher le Front national de remporter une élection. Même si cela revenait à appeler à voter pour la droite. Ce cas de figure s’est présenté encore récemment dans l’entre-deux tours des régionales, en décembre 2015. Arrivés en troisième position respectivement dans les Hauts-de-France et en Paca, Pierre de Saintignon et Christophe Castaner s’étaient retirés pour contrer les victoires de Marine Le Pen et Marion Maréchal-Le Pen. Dans le Grand-Est, Jean-Pierre Masseret avait fait figure de rebelle en se maintenant malgré les consignes de son parti.
Mais ça, c’était avant. Pour l’élection présidentielle de 2017, le Parti socialiste doit envisager un autre scénario en cas de duel LR-FN au second tour : le ni-ni. Un revirement lié à la candidature de Nicolas Sarkozy, dont le PS estime qu’il va "le plus loin possible dans le tutoiement du FN" . C’est en tout cas l’avis de la députée PS Karine Berger, qui détaille sa proposition au Monde ce 2 octobre :
"Nous pensons que le PS doit s’exprimer avant que la droite ne désigne son candidat pour évoquer la possibilité d’un second tour de la présidentielle droite/extrême droite avec Nicolas Sarkozy comme candidat. En septembre 2015, j’avais essayé d’évoquer la question du désistement de la gauche en cas de risque FN pour les régionales de décembre et cela n’avait pas été possible. Je m’en veux de ne pas avoir porté le sujet dans le débat interne voire dans le débat public avant décembre 2015 car on savait que cela pouvait arriver. Le fait de ne pas l’anticiper a brisé l’union des socialistes sur ce sujet.
Nous sommes là dans un cas de figure différent que nous devons aussi anticiper. Nicolas Sarkozy a un discours et des positions qui, sur les questions d’immigration et d’identité, sont à nos yeux les mêmes que celles du FN. C’est pourquoi je vais demander à ce que le PS puisse envisager d’appeler à voter ni pour l’un ni pour l’autre, si Nicolas Sarkozy est le candidat de la droite.
"
Pour la députée des Hautes-Alpes, membre du courant La Fabrique, entre les légitimistes et les frondeurs, Nicolas Sarkozy est tout aussi dangereux que Marine Le Pen. À tel point qu’un "front républicain" ne serait pas envisageable derrière le candidat… Les Républicains. Une situation qui serait inédite puisque, lors du premier duel droite-FN en 2002, le PS - dont François Hollande était alors à la tête - avait appelé à voter pour Jacques Chirac pour faire barrage à Jean-Marie Le Pen.
À la sortie du Conseil national du PS ce 2 octobre, Jean-Christophe Cambadélis a adressé une fin de non-recevoir à la demande de Karine Berger, pour trois raisons :
"Nous ne pouvons pas nous engager dans ce sens car ce serait dire que nous souhaitons qu’Alain Juppé soit désigné par la droite et que nous prenons le risque que Marine Le Pen gagne la présidentielle. En aucun cas nous ne devons nous aventurer dans cette voie. Et cela reviendrait à dire que le Parti socialiste ne serait pas présent au second tour de la présidentielle et nous nous battrons pour qu’il le soit.
"
Et pourtant, la présence de Marine Le Pen au second tour de la présidentielle est quasiment inévitable, estime Manuel Valls . Et, au vu des sondages, celle du candidat de la droite aussi.