Les sénateurs ont décidé lundi soir de taxer l'huile en adoptant un amendement déposé par le groupe écologiste lors du débat sur le budget 2013.
Delphine Dumont réagit à cette taxe déjà surnommée "taxe Nutella". Une mesure de santé publique ? Notre blogueuse trouve que les arguments à ce sujet sont un peu fragiles et s'interroge sur le but de cette idée.
Huile de palme : "Désigner des coupables à la hâte ne règlera rien"
La semaine dernière, le projet de taxe sur l'huile de palme a été repoussé à une date ultérieure non fixée. Surnommé "amendement Nutella", ce projet prévoyait d'augmenter de 300% la taxe en vigueur.
Tout commence mi-novembre lorsque Jean-Louis Roumegas, sénateur EELV, ajoute cette proposition au projet de budget 2013 de la Sécurité sociale. Adopté en commission des Affaires sociales, l'amendement est annulé par le rejet du projet de budget par le Sénat. Lors du passage à l'Assemblée nationale, il est décidé d'attendre un futur projet de loi de santé publique sur les lipides.
L'amendement Nutella devrait donc disparaître au profit d'un projet plus vaste sur, dixit Marisol Touraine, "les nutriments qui ont des effets néfastes sur notre alimentation".
Si les amateurs de la célèbre pâte à tartiner sont ravis, les écologistes, eux, grognent. Ils accusent les producteurs d'huile de palme de provoquer une déforestation massive. Directement visée, la Malaisie a protesté et avancé les efforts importants qu'elle fait pour conserver ses forêts.
Au-delà des arguments écologiques, les arguments de santé sont un peu fragiles également. Par exemple, le chef du service nutrition de l'Institut Pasteur de Lille est beaucoup moins catégorique en ce qui concerne les dangers de l'huile de palme.
La surtaxation de l'huile de palme avait pour but d'inciter les industriels à revoir la composition de leurs produits. Quel corps gras vont-ils utiliser en remplacement, on l'ignore, mais une substitution précipitée n'est pas souhaitable. Les effets sur la santé de la nouvelle huile doivent être parfaitement connus, de même que les coûts induits par le changement doivent pouvoir être absorbés par les fabricants.
Enfin, l'augmentation de l'obésité dans notre société demande une réflexion globale sur notre alimentation. Désigner des coupables à la hâte ne règlera rien. À moins que le but de cette surtaxe n'ait été que financier et non sanitaire ou écologique...
[Mise à jour] Un nouvel amendement visant les produits présentés comme dangereux pour la santé a été adopté lundi, au Sénat. L'amendement visait non seulement l'huile de palme, mais aussi l'aspartame et le diesel. L'amendement adopté ne retient que l'aspartame et l'huile de palme. La taxe pour le premier est de 30 euros au kilo. Pour la seconde, la taxe existante est augmentée de 200%, soit 300 euros à la tonne.
En excluant le diesel, le Sénat montre qu'il n'est pas tant question de santé que de créer de nouveaux prélèvements sur l'industrie. De plus, malgré la hausse importante, ces taxes ne seront pas suffisantes pour inciter les fabricants à trouver des substituts et le coût sera dont finalement assumé par les consommateurs.