[EDIT 15/09] Les équipes de la nouvelle émission de Yann Barthès, "Quotidien", se sont également vu refuser leur demande d'accréditation par le FN pour les "Estivales de Marine Le Pen" à Fréjus (Var) samedi et dimanche, informe l'AFP. Marine Le Pen a ostensiblement refusé de répondre à ses reporters, selon des images diffusées lundi dans le programme de TMC. L'émission "Le Petit journal" sur Canal+, anciennement présentée par Yann Barthès mais désormais reprise par Cyrille Eldin, a en revanche été accréditée.
C'est un bref communiqué envoyé aux rédactions ce lundi 12 septembre :
"Florian Philippot, Vice-Président du Front National, sera demain mardi 13 septembre, l'invité du Petit Journal sur Canal +, à 20h30.
"
Voir les termes "Florian Philippot", "invité" et "Petit Journal" associés dans la même phrase a de quoi dérouter l'observateur un peu attentif de la vie du FN. Le n°2 du parti frontiste n'a en effet pas toujours été tendre avec l'émission de Canal+. En novembre 2014, le vice-président du FN estimait ainsi sur iTÉLÉ que les journalistes du Petit Journal étaient "des militants , il faut l'assumer". "En tout cas ce sont des militants anti-Front national. […] Ce ne sont pas des médias, ce ne sont pas des journalistes", ajoutait-il.
Cela ne vous aura pas échappé mais Le Petit Journal a quelque peu changé cette année. Yann Barthès et son équipe ont migré sur TMC. La nouvelle émission de Bangumi, Quotidien, débute d'ailleurs ce lundi 12 septembre. Mais Le Petit Journal, dont le nom appartient à Canal+, perdure sous la houlette de Cyrille Eldin, non sans quelques critiques acerbes .
C'est donc dans cette émission que se rendra mardi Florian Philippot. Rien d'anormal selon l'intéressé qui explique au Lab :
"Je n'ai jamais cessé d'aller sur Canal, et je n'avais jamais été invité par 'Le Petit Journal'. Cette émission a le même nom que l'ancienne, pour le moment apparemment, mais plus rien à voir manifestement. Elle se veut moins sectaire.
"
Après visionnage des premières émissions, on ne saurait contredire Florian Philippot sur le fait que la nouvelle mouture du Petit Journal n'a "plus rien à voir manifestement" avec l'ancienne. Mais le n°2 du FN ne s'arrête pas là. Si le parti a longtemps blacklisté Le Petit Journal version Yann Barthès de ces raouts politiques, la nouvelle émission Quotidien semble bénéficier d'une relative bienveillance à l'heure de sa naissance. Florian Philippot, qui donc qualifiait il y a moins de deux ans les journalistes du Petit Journal de "militants anti-Front national", ne s'interdit pas de se rendre sur le plateau de Quotidien s'il est invité. "J'attendrais de voir à quoi ça ressemble", explique-t-il.
Cette réflexion s'inscrit dans un certaine mouvement au Front national, un changement de ton léger de certains cadres du parti vis-à-vis des journalistes. Les journalistes de Quotidien ont par exemple pu être accrédités pour les Estivales de Fréjus.
L'interview de Marine Le Pen dimanche 11 septembre dans Vie Politique sur TF1 fut le parfait exemple de l'évolution de ces relations. La présidente du FN, qui a reconnu à l'antenne avoir pour principal défaut en politique d'être "abrupte", a retenu tous ses coups. Autre exemple début septembre : L'Opinion nous apprenait que la cheffe frontiste de disait ravie de l'émission politique faite avec Karine Le Marchand et dont la diffusion, sur M6, est prévue pour cet automne.
Il n'y a pas si longtemps pourtant, Marine Le Pen n'hésitait pas à attaquer les journalistes en direct. En mars 2014 sur BFMTV, l'élue FN s'en prenait à Apolline de Malherbe sur un terrain personnel . À la même époque, elle vilipendait Canal+, "chaîne bobo horrible" . Quelques mois plus tard, elle adoptait un comportement aussi virulent à l'égard de Laurence Ferrari , sur iTÉLÉ. Ce ne sont là que des exemples des relations compliquées entre le FN et les médias.
Les temps ont-ils changé à quelques mois de l'élection présidentielle ? Pas tout à fait. Certes, Florian Philippot va au Petit Journal et, d'accord, Marine Le Pen tente de combattre son caractère "abrupt" lorsqu'elle est interrogée par des journalistes. Les médias mainstream profitent semble-t-il d'un certain apaisement des relations. Mais derrière la vitrine, au-delà des deux personnalités les plus médiatisées du FN, les échanges restent très tendus entre le parti et certains organes.
En juin, Mediapart avait ainsi rapporté des échanges houleux entre certaines villes FN et la presse régionale et le boycott opéré par certaines municipalité vis-à-vis des publications locales. Début juin, le maire FN de Fréjus David Rachline a ainsi ouvertement critiqué Var-Matin, dénonçant "un journalisme aux relents de totalitarisme", une "manipulation", des "pratiques de désinformation". La faute de Var-Matin, avoir notamment " relaté le mécontentement suscité par plusieurs projets municipaux", écrivait Mediapart.
Mediapart sera d'ailleurs le seul média à se voir refuser l'accès des Estivales de Marine Le Pen, explique au Lab un responsable du FN. L'an dernier, le site internet s'était déjà vu refusé son accréditation, tout comme Le Petit Journal. Pourquoi cet éternel boycott ? Mystère même si les enquêtes de Mediapart sur le financement du FN semblent irriter depuis de longues années les instances dirigeantes du parti.
Les exemples récents de relations tendues entre les médias et le FN sont donc toujours nombreux. La venue de Florian Philippot sur le plateau du Petit Journal mardi 13 septembre ne saurait modifier cette réalité.