#PASBIEN - Quitter son poste de député et de président de commission - à mi-mandat - pour diriger une filière d'une entreprise publique, c'est du jamais vu selon des connaisseurs de l'Assemblée. L'annonce du possible départ du socialiste François Brottes, président de la commission des Affaires économiques, pour prendre la tête de la RTE (Réseau de transport d’électricité), crée la consternation au sein de la majorité. L'information du JDD, ce mercredi 22 juillet, confirmée au Lab par des élus, sème le trouble. Un ténor de l'Assemblée se désole :
"Si la droite avait fait cela, j'aurais crié au conflit d'intérêt !
"
Ces élus de la majorité ne sont toutefois pas surpris. Cette nomination, qui selon Le JDD devrait être annoncée jeudi 23 juillet, ne sera effective qu'après plusieurs validations pour une prise de fonction en septembre. Selon l'hebdomadaire, un conseil de surveillance de la filiale doit se réunir jeudi 23 juillet pour proposer sa nomination. La rumeur courait depuis déjà de nombreuses semaines. L'UMP, au mois d'avril, dénonçait déjà un possible conflit d'intérêt. Interrogé en mai par Le Dauphiné libéré, François Brottes parlait alors de rumeur . A l'Assemblée nationale, à gauche, certains trouvent ce départ très calculé.
# Pas d'élection partielle :
Le départ de François Brottes n'entraînera pas de partielle. Si les calculs de Pierre Moscovici n'avaient pas été bons (à quelques jours près, il avait fallu passer par la case élection), ceux de François Brottes sont parfaits. Parlementaire en mission, il est automatiquement remplacé par son suppléant. La règle dit que le suppléant du député en mission est en droit de le remplacer dans les 6 mois. Février 2015 - août 2015, le compte est bon : 6 mois pile... Donc pas d'élection législative partielle à la rentrée dans l'Isère. Des partielles qui ne réussissent *pas trop* à la majorité .
# Une mission sur mesure :
Il a été chargé par le premier ministre Manuel Valls d’une mission temporaire sur la sécurité de l’approvisionnement électrique dans un cadre national et européen par un décret du vendredi 20 février 2015. Il doit remettre son rapport cet été. L'approvisionnement électrique, cela tombe bien, c'est pile poil la mission de la RTE. Elle gère 100.000 kilomètres de ligne de haute tension.
# Pas un pantouflage :
Si le passage dans le secteur privé - le "pantouflage" - est très cadré, le passage dans une entreprise publique l'est beaucoup moins. Les élus sont moins "encadrés" que les hauts fonctionnaires. Néanmoins, ce transfert pose - selon des collègues socialistes - un problème de conflit d'intérêt. Le spécialiste de l'énergie du PS, en charge des dossiers EDF ou AREVA, va diriger la filiale d'un groupe public qu'il contrôlait en tant que législateur quelques mois plus tôt.
Un pilier de la salle des 4 colonnes à l'Assemblée s'interroge :
"Je ne comprends pas que le gouvernement accepte ! C'est une confusion des genres grave. C'est pas bien.
"
Contacté par Le Lab, François Brottes n'a pas répondu à nos sollicitations. Mardi 21 juillet, il auditionnait Emmanuel Macron notamment sur les dossiers liés à l'énergie.
[EDIT 24 JUILLET]
Face à la polémique suite à la proposition du nom de François Brottes au poste de président du directoire du gestionnaire public du Réseau de transport d’électricité, jeudi 23 juillet, le parti socialiste a répondu dans un communiqué vendredi 24 juillet. Le groupe explique :
"L’accusation de conflit d’intérêts n’a aucune justification. Comme parlementaire et comme président de la commission des Affaires économiques, il a traité toutes les grandes questions économiques sans être lié à aucun groupe d’influence. François Brottes a été ainsi l'un de ceux qui a combattu la séparation ente EDF et RTE. Et la commission de régulationn a la responsabilité de vérifier que sa nomination ne contrevient à aucune règle déontologique."
L'opposition depuis l'annonce de cette nomination est très critique. Le parti Les Républicains, dans un communique explique vendredi 24 juillet : "Il est pour le moins choquant de constater que le potentiel conflit d’intérêts relatif à cette nomination ne perturbe pas le moins du monde le gouvernement et le Président de la République."
François Bayrou sur RTL estime pour sa part que : "Cette décision est profondément malsaine".