À LA RECHERCHE DU RESPECT - Non, vous n'êtes pas dans l'arène surchauffée d'une cantine scolaire où, affamés et dissipés, des écoliers tapent sur leurs tables, un couvert dans chaque main, pour réclamer une deuxième ration de frites. Vous êtes bien à l'Assemblée nationale, un mardi de la fin 2016, pendant le discours de politique générale d'un Premier ministre nouvellement nommé.
Une fois la prise de parole de Bernard Cazeneuve (puisqu'il s'agit de lui) terminée, le patron des députés LR Christian Jacob lui succède à la tribune, ce 13 décembre. Mais au bout de quelques instants, il s'arrête et lance :
"Dès que monsieur le Premier ministre aura terminé de lire ses textos, on pourra continuer...
"
Le chef du gouvernement était visiblement un tantinet dissipé au sortir de son discours d'environ 50 minutes, le tout suscitant un gros brouhaha. C'est alors que jaillit peu à peu le cri suivant depuis les bancs de la droite :
"Le respect ! Le respect ! Le respect ! Le respect ! Le respect ! Le respect !
"
Même Christian Jacob ne peut réprimer un sourire en coin devant cette récrimination venue du cœur de ses troupes. Et comme le remarque fort justement la journaliste de France 3 Danielle Sportiello, qui "commente" la séance, "on est loin de la solennité habituelle qui suit les grands discours de politique générale"...
Les élus Les Républicains ont peut-être été inspirés par Bernard Cazeneuve lui-même qui, quelques minutes plus tôt, avait placé son action sous le signe du respect, dans une sorte de sermon adressé à l'opposition :
#Cazeneuve, dans un développement passionné, explique vouloir "placer au cœur de son action la notion de respect" pic.twitter.com/PkM4xKMz5g
— BFMTV (@BFMTV) 13 décembre 2016
Voilà, on n'a pas grand chose d'autre à en dire alors on pose ça là.
[BONUS TRACK]
Bernard Cazeneuve, lui aussi, cherche le respect. Et ce n'est généralement pas lors des séances de questions au gouvernement (tous les mardis et mercredis) qu'il le trouve. Reprenant la parole après les présidents de groupes ce mardi, le Premier ministre a délivré un véritable plaidoyer anti-chahut lors des QAG repéré par LCP :
"Depuis trop longtemps, je vois, mercredi après mercredi, mardi après mardi, les questions d'actualité s’égrener, les vociférations et le vacarme occuper tout l'espace, les invectives l'emporter sur la confrontation noble des points de vue qui en démocratie devrait toujours prévaloir. Et si je peux en cinq mois - modestement, je ne suis pas sûr d'y parvenir - faire en sorte que nous puissions nous opposer aux uns et aux autres, débattre les uns avec les autres dans cette période électorale de telle sorte que le respect soit une valeur qui l'emporte sur toutes les autres, alors j'estimerai déjà que j'aurai fait oeuvre utile.
"
Tel Bruno Le Roux en son temps donc, qui déplorait de voir deux fois par semaine dans l'hémicycle des comportements que l'on voit habituellement "dans un stade". À noter qu'il arrive tout de même à Bernard Cazeneuve, ordinairement calme et froid, de faire péter les décibels et de s'adonner à la "vocifération" lors des QAG :
Alors certes, il n'est pas encore au niveau de Manuel "engueulator" Valls. Ce dernier, malgré sa pratique régulière du coup de gueule, disait d'ailleurs ne pas trop apprécier ces ambiances tendues, vantant par opposition celle "moins passionnée" et avec "plus de dialogue" du Sénat.