LA CRISE ? - Le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, Christian Jacob, a annoncé durant les questions au gouvernement mardi 17 février que l'opposition déposerait une motion de censure contre le gouvernement si ce dernier prenait la décision de recourir à l'article 49.3 sur la loi Macron.
Un conseil des ministres exceptionnel a été convoqué à 14h30 à l'Élysée sur ce sujet, l'exécutif doutant visiblement de sa capacité à sécuriser une majorité assez large pour faire adopter ce texte sans passage en force. Pour Christian Jacob, cette décision serait "un échec cuisant" prise "dans l'urgence et la panique", s'interrogeant sur "la capacité de gouverner" de Manuel Valls. Et de lancer :
"En êtes-vous réduit à bâillonner l'Assemblée nationale parce que n'y avez plus de majorité ?
"
La motion de censure évoquée par le chef de file des députés d'opposition peut être déposée dans un délai de 24 heures après l'annonce par le Premier ministre de l'application du 49.3, décision qui ne peut être prise qu'après accord du conseil des ministres. Le vote sur cette motion de censure doit avoir lieu jeudi soir.
Ce à quoi Manuel Valls a répondu, sans officialiser le recours au 49.3 et dans une ambiance surchauffée :
"Le gouvernement fera tout pour que cette loi passe parce que cette loi, elle est utile pour le pays.
"
"J'ai confiance dans les institutions. Il y a un président de la République, un gouvernement et une majorité, a encore déclaré Manuel Valls. Et quoi que vous disiez, nous continuerons à gouverner et à réformer le pays. Il y a non seulement une majorité, mais ce que je sais, c'est qu'il n'y a pas de majorité alternative."
Répondant ensuite au patron des députés UDI Philippe Vigier sur l'adoption de la loi Macron, le Premier ministre a ajouté :
"Si chacun se ressaisit, si chacun prend bien conscience qu'il se passe quelque chose d'important et que nous sommes face à un moment de vérité, cette loi peut encore passer dans cet hémicycle. [...] Si ce n'est pas le cas, j'assumerai toutes mes responsabilités.
"
Auparavant, Emmanuel Macron avait eu une vive passe d'armes avec la députée communiste Jacqueline Fraysse, fermement opposée au texte du ministre de l'Économie. Estimant qu'elle se retrouvait aux côtés de l'UMP dans son opposition à ce texte, le ministre a déclaré :
"Vous vous retrouvez de part et d'autre d'une forme d'union, ceux qui ne veulent pas changer le pays, ceux qui préfèrent dire que tout va bien. Mais nous, nous avancerons.
"
Réponse définitive après les QAG, donc. Mais comme le rappelle le député socialiste Christophe Caresche, le recours au 49.3 et, en conséquence, la motion de censure que déposera l'UMP, mettrait les frondeurs face à leurs responsabilités :
#QAG Si le 49-3 est engagé la question sera de savoir si les frondeurs voteront la motion de censure de l'UMP!
— Christophe Caresche (@CCaresche) 17 Février 2015
Plus que jamais opposés au texte du ministre de l'Économie, iront-ils jusqu'à voter la motion de censure pour exprimer leurs divergences ? Rien est moins sûr, ce choix revenant pour eux à quitter la majorité parlementaire.
[Edit 19h35]
La motion de censure a été adoptée par l'UMP en fin d'après-midi. En voici le texte, que s'est procuré l'AFP et qui ne se limite pas à une critique de la seule loi Macron :
"Ce passage en force, au mépris des deux cents heures de débat qui se sont écoulées depuis le début de l'examen de ce texte, témoigne d'une réalité : ce gouvernement n'a plus de majorité. Il n'a plus de majorité parce qu'il a déserté le champ de la politique économique et sociale de la France. Comme nous l'avons dénoncé tout au long de l'examen de ce projet de loi, celui-ci n'est qu'une compilation de mesures hétéroclites qui ne libèrent ni le travail, ni l'investissement, ni l'activité.
Ce projet de loi est à l'image de l'action du gouvernement depuis 2012 : aucune réforme de structure ; des revirements incessants au détriment de l'emploi et de la compétitivité ; des choix qui annihilent toute chance de reprise alors que la croissance frémit en Europe. Sans réforme de l'État, sans réforme de nos régimes de retraites, sans réforme de la protection sociale, sans réforme du code du travail, sans réforme du paritarisme, ce texte a minima est une occasion manquée de mener le redressement de notre pays, à l'image de nos partenaires européens qui, eux, se sont déjà engagés dans ces réformes.
Plutôt que de réformer la fiscalité des sociétés et des ménages, le gouvernement réussit la prouesse d'augmenter à la fois les impôts et les déficits. Plutôt que de construire la France de demain, le gouvernement mène une politique qui assombrit les perspectives de sa jeunesse.
"