Voilà comment Jean-François Copé peut s’inspirer de Valéry Giscard d’Estaing, Alain Juppé, Lionel Jospin et Dominique Strauss-Kahn pour réussir son retour

Publié à 11h42, le 21 juin 2014 , Modifié à 11h44, le 21 juin 2014

Voilà comment Jean-François Copé peut s’inspirer de Valéry Giscard d’Estaing, Alain Juppé, Lionel Jospin et Dominique Strauss-Kahn pour réussir son retour
Jean-François Copé le 11 juin 2014 / Maxppp

PARTIR UN JOUR SANS RETOUR ? - Alors que Jean-François Copé a quitté la présidence de l'UMP le 15 juin, il a déjà l'intention de revenir en politique par la grande porte. Le départ de la vie politique française a souvent été tenté par des hommes politiques au plus bas : de Jospin à Juppé en passant par DSK. Retour sur ces come-back politiques de la Vème République, plus ou moins réussis, appliqués au cas Copé avec les explications de Christian Delportes, auteur de Come back ou l’art de revenir en politique.


>> Valéry Giscard d’Estaing, remonter les échelons politiques


En avril 1980, un an avant la présidentielle, Valéry Giscard d’Estaing, alors président, a une côte d’avenir de 56%, très élevée pour un président en exercice. Tous les sondages le donnent gagnant quel que soit le candidat en face. En mai 1981, François Mitterrand est élu. VGE ne comprend pas son échec comme il le confirme dans le Pouvoir et la Vie :


Pourquoi ai-je échoué ? En raison du chômage ? D'une lassitude des Français ? J'étais crédité de 60 % de bonnes opinions et puis tout à coup une tornade s'est levée. C'est un phénomène étrange.


Si son « au revoir » est resté célèbre, il est bref. Dès 1982, VGE reprend des fonctions politiques en devenant conseiller général du Puy-de-Dôme. Puis député en 1984. Il préside ensuite la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée puis mène la liste de la droite aux Européennes de 1989 avec succès. Il prend entre temps la tête de l’UDF mais a raté le virage de 1988, devancé par Raymond Barre. L’élection de 1995 semble, elle, trop lointaine, comme le confirme auprès du Lab le politologue Christian Delportes :


Le problème de Giscard c’est que les échéances politiques lui étaient défavorables. Le timing a été mauvais. Il s’est fait doubler par Raymond Barre alors qu’il ne le pensait pas capable de rivaliser avec lui et en 1995 il avait vieilli. Et puis tarder à prendre la tête de l’UDI l’a desservi aussi.


Leçons pour Jean-François Copé :

  • Repartir d’en bas peut fonctionner à condition de coordonner les échéances politiques
  • Revenir trop vite empêche de créer un statut neuf, une nouvelle image

>> Alain Juppé : la persévérance paye


En juin 1995, Alain Juppé est au top de sa popularité avec près de 60% de côte d'avenir. En 1999, dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris, il est mis en examen pour "abus de confiance, recel d’abus de biens sociaux, et prise illégale d’intérêt". La sanction tombe le 1er décembre 2004 : 1 an d’inégibilité. Son passage à Matignon où la hausse de la TVA et les grèves passent mal finissent de donner un coup de frein à sa popularité: sa côte d’avenir est tombée à 18%.


Exilé au Québec où il devient professeur, il revient au bout de deux ans, en 2006, pour affirmer sa volonté de revenir dans le jeu politique. Notamment pour reconquérir la mairie de Bordeaux, ce qu’il parvient à faire la même année.


Il s’aligne derrière Nicolas Sarkozy pour la présidentielle de 2007 et sa côte rebondit à 40% en juin 2007. Sa participation au gouvernement en tant que ministre de la Défense puis des Affaires étrangères, sa figure tutélaire au sein de l’UMP et son expérience lui permettent de se stabiliser autour de 40% en avril 2014 au point d’en faire un candidat crédible pour la primaire UMP de 2016 (s’il y en a). Christian Delportes y ajoute une dimension de communication :


Juppé a été exclu avec l’image de quelqu’un qui payait pour un autre. Il a réussi à reconstruire son image en s’ouvrant à d’autres problématiques comme l’écologie. Il a accepté sa traversée du désert et le fait de changer de vie. Il est revenu avec une image plus sage sans avoir réellement coupé les ponts avec la politique grâce à son blog.


Leçon pour Jean-François Copé:

1/ Les postes à responsabilité gouvernementale peuvent permettre de remonter la pente

2/ Être "probablement le meilleur d’entre eux"  peut aider


>> Lionel Jospin : être dans l’ombre ne suffit pas

21 avril 2002 : Jean-Marie Le Pen arrive au second tour de la présidentielle contre Jacques Chirac. Défait, Lionel Jospin annonce son retrait de la vie politique. En avril 2002, sa côte de popularité est de 59%.


Exilé à l’île de Ré, il revient en février 2003 par une tribune au Monde où il affirme que "parler n’est pas revenir". Il réapparaît dans les sondages  en octobre 2004 avec une côte de 39% largement en deçà de ses performances passées.


Pourtant, Lionel Jospin songe au retour et à se présenter en 2007 comme le sauveur d’une gauche divisée. En 2006, il annonce même être "capable d’assumer la charge de chef de l’Etat" mais se retire finalement de la course aux primaires car distancé par la nouvelle figure émergente de Ségolène Royal. Pour Christian Delportes, c’est aussi une attente insuffisante qui lui a fait défaut :


Le problème de Jospin, c’est qu’on a mal compris son discours en 2002. Son départ n’était pas définitif. Il a été à deux doigts de revenir mais il n’a pas sauté le pas. Et puis, pour revenir il faut manquer.

Leçons pour Jean-François Copé :

1/ L’île de Ré ne rapporte pas de points dans l’opinion

2/ Rester loin peut pénaliser, même avec une ombre importante

3/ Ne pas laisser les jeunes ambitieux prendre le pouvoir à l’UMP sous peine de ne jamais revenir


>> Dominique Strauss-Kahn : la stratégie presque payante


Le parcours de popularité de Dominique Strauss-Kahn est tortueux. Sa nomination au poste de ministre de l’Economie dans le gouvernement de Lionel Jospin en 1997 lui vaut un pic de popularité à 40% en juillet de la même année. Les affaires qui lui sont attribuées à l’époque le font chuter à 18% en octobre 2000. Mais il revient et s’impose comme un "éléphant du parti". Sa côte ne cesse de progresser, malgré sa défaite à la primaire socialiste de 2006 et atteint son plus haut taux en août 2007 où il est pressenti pour devenir directeur du FMI avec un pic à 53%.

Son exil dure 4 ans et lui réussit plutôt. Il se stabilise autour des 50% de popularité et s’impose comme le candidat naturel de la gauche pour 2012 en cas de primaire. L’affaire du Sofitel le 14 mai 2011 le plonge évidemment au plus bas à 17%. Christian Delportes  considère que l’exil au FMI n’assure pas une popularité dans son propre camp :

Le FMI c’est un exil doré. Pourtant, DSK était le candidat des sondages, pas du PS. D’ailleurs Hollande pensait pouvoir le battre aux primaires. Mais le problème reste le même : il y avait un retour dans l’opinion mais pas forcément dans les urnes.

Leçons pour Jean-François Copé :

1/ Gérer le FMI et ne pas pouvoir parler de la France aide beaucoup (mais il faut être au point en économie)

2/ Les affaires ne tuent pas forcément une carrière politique

Du rab sur le Lab

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