Comment le gouvernement a progressivement abandonné la stabilité fiscale pour 2014

Publié à 12h45, le 15 avril 2013 , Modifié à 13h33, le 15 avril 2013

Comment le gouvernement a progressivement abandonné la stabilité fiscale pour 2014
François Hollande sur France 2 le 28 mars, Pierre Moscovici sur France Inter le 15 avril, Jérôme Cahuzac sur Europe 1 le 6 janvier et Michel Sapin sur Canal Plus le 27 février.

En début d'année, le gouvernement assurait à l'unisson qu'il s'engageait sur la"stabilité fiscale", soit le fait de ne plus augmenter le poids des impôts pour les ménages et les entreprises.

Changement de rengaine ce 15 avril à deux jours de la présentation du programme de stabilité en conseil des ministres, ce document remis chaque année par les états de l'Union européenne et présentant la stratégie à moyen terme des finances publiques d'un pays. On apprend que la part des prélèvements obligatoires dans le PIB va finalement augmenter de "0.2 à 0.3 points" en 2014. Et "ce n'est pas une surprise", assure cette fois-ci Pierre Moscovici à l'antenne de France Inter.

Le Lab revient sur ces annonces pour le moins contradictoires.

[6 janvier 2013] Le gouvernement s'accroche à la promesse de "stabilité fiscale"

Au micro d'Europe 1, Jérôme Cahuzac, alors ministre délégué au Budget, confirme que la "stabilité fiscale" est la politique du gouvernement pour le reste du mandat. Une promesse déjà faite en septembre 2012 et donc réitérée.

Partant de l'idée qu'un "effort considérable" est demandé en 2013 aux contribuables et que "demander davantage serait probablement demander trop", il assure que les "agents économiques" doivent savoir qu'ils ne seront pas davantage ponctionnés.

[23 février 2013] Des impôts en plus ... mais pas plus lourds

Première écorchure à cette promesse : François Hollande annonce au détour d'un déplacement de possibles "prélèvements supplémentaires subsidiaires".

Encore sur Europe 1, le ministre en charge du Budget va alors s'efforcer d'expliquer que ce n'est pas parce qu'on augmente certains prélèvements que la stabilité fiscale est menacée. Au contraire.

Il développe :

En 2013, il y a eu cinq à six milliards d’impôts levés qui ne le seront pas en 2014, car ils ne pouvaient l’être qu’une seule année.

Si nous ne faisons rien de plus en matière de fiscalité, il y aurait cinq à six milliards d’euros d’impôts de moins en 2014.

Bref, pour compenser les prélèvements prenant fin en 2014, de nouveaux devront surgir. Mais leur poids, lui, ne changera pas, martèle-t-il.

Ce ne sont pas des impôts nouveaux, c’est un prélèvement obligatoire stable !

Dans les jours qui suivent, tous les ministres concernés vont prendre le pas sur cette explication. Ainsi de Michel Sapin le 27 février sur Canal Plus qui - à défaut de pouvoir promettre la fin des hausses d'impôts - assure que la "pression fiscale" restera strictement identique :

- Michel Sapin : Aujourd’hui la ligne du gouvernement, c’est de ne pas augmenter la pression fiscale.

- Journaliste : Les impôts ne seront pas augmentés ?

- Michel Sapin : Il ne faut pas augmenter la pression fiscale. Il ne faut pas augmenter la part des impôts dans la richesse nationale.

- Dites-nous le clairement, on n’augmente pas les impôts ?

- Il y a l’année prochaine des impôts qui vont se terminer, il faut maintenir la pression fiscale.

[28 mars 2013] En fait, on avait oublié la TVA ...

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Lors de son entretien télévisé sur France 2, François Hollande rappelle l'existence d'un dispositif déjà voté mais mis en place seulement pour 2014: la hausse de la TVA. Les taux supérieurs et intermédiaires vont en effet passer de 19.6 à 20% et de 7 à 10%. Le taux réduit, lui, va baisser de 5.5 à 5%.

Pour qu'il y ait bien "stabilité fiscale", cette hausse aurait dû être compensée pas des baisses de prélèvements ailleurs. Ce ne sera pas le cas.

[15 avril 2013] Bye-bye la stabilisation fiscale pour 2014

La chose est officialisée par Pierre Moscovici sur l'antenne de France Inter, deux jours avant le conseil des ministres consacré au programme de stabilité et après la publication de l'information par Les Echos.

Le quotidien révèle que le poids des prélèvements obligatoires augmentera bien en 2014 : son taux passera de  46.3% de PIB en 2013 à 46.5% en 2014.

Une information confirmée ce lundi par le ministre de l'Economie qui chiffre ce surplus d'impôts à six milliards d'euros (contre dix milliards selon Les Echos). "Pas une surprise", assure-t-il :

Il y aura une hausse des prélèvements obligatoires annoncée de 0.2 à 0.3 points, c’est plutôt de l’ordre de six milliards.

Il classe ensuite ces augmentations en deux catégories :

Comme l’a dit le président de la République sur France 2, il n’y aura qu’une hausse, d’un seul impôt, pour les ménages. C’est celle de la TVAdéjà annoncée pour financer le crédit d'impôt compétitivité.

Deuxièmement, il y aura aussi des prélèvements qui viendront essentiellement des niches fiscales improductives sur lesquelles nous voulons récupérer des ressources.

Contrairement à ce qui était assuré trois mois plus tôt, la pression fiscale connaitra donc bien une augmentation. Elle reste cependant très légère en comparaison de celle appliquée entre 2012 et 2013 : le poids des prélèvements obligatoires dans le PIB avait alors augmenté de 1.4 points.

Du rab sur le Lab

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