Coup d'Etat. Le mot est tabou dans la majorité. Celui qu’il ne faut surtout pas prononcer. Ni Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, ni Harlem Désir, premier secrétaire du Parti socialiste, n’ont souhaité qualifier de coup d'Etat la destitution du président Mohamed Morsi par les forces militaires en Egypte le 3 juillet dernier.
Lui, en revanche, l’ose. Et l'assume. Dans une interview accordée au Parisien de ce samedi 17 août, l’ancien socialiste et ancien ministre des Affaires étrangères de Nicolas Sarkozy, Bernard Kouchner, n’hésite pas à user du terme de coup d’Etat.
La démocratie doit exiger que l’on respecte son verdict. Il y a eu des élections libres en juin 2012, et on ne peut pas interrompre le processus par un coup d’Etat sous prétexte que les mesures prises en plaisent pas.
S’il explique que "ça ne lui fait pas plaisir de dire ça", Bernard Kouchner estime qu’il aurait fallu laisser le pouvoir en place jusqu’à la fin de son mandat. Pousser l'expérience jusqu'au bout. Un respect démocratique, tout simplement, assure-t-il.
Ca ne me fait pas plaisir de dire ça mais il fallait que l’expérience des Frères musulmans aille à son terme en Egypte. Quitte à changer de majorité le cas échéant, aux élections suivantes.
En outre, l’ancien patron de la diplomatie française regrette le manque d’unité de la réponse européenne – "qui verse quand même 5 milliards par an" - à la situation égyptienne. Et fustige le silence de l’Union européenne :
Pour l’instant, on ne l’a pas entendue. Catherine Ashton (…) a certes rendu visite à Mohamed Morsi en prison. C’était bien, c’était un joli geste. Mais enfin, cela ne suffit pas.
Et poursuivre, sur le ton du coup de gueule désabusé :
L’Europe ne parle pas d’une voix commune, elle ne s’exprime pas clairement.
C’était le moment, nom de nom ! Quelle déception !