Pour évacuer les soupçons qui pèsent sur le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, les éléments de langage ne manquent pas. Il en est un particulièrement apprécié du Président-candidat et de son conseiller, Henri Guaino : résumer l’affaire Bettencourt à une simple série de rencontres légitimes.
Qui a écrit le discours de qui ? Les deux sont en tout cas bien accordés.
"Est-ce que Monsieur Bettencourt est un délinquant ?"
Sur bfmtv.com
Nicolas Sarkozy et ses proches sont régulièrement interrogés sur le financement de sa campagne en 2007, et notamment sur une série de rencontres avec André Bettencourt avant l’élection.
Ils ont donc décidé de retourner les faits en leur faveur, en les ridiculisant. Démonstration avec Henri Guaino le 8 avril sur BFM TV et RMC :
Qu’est ce qu’il reste pour l’instant de cette fameuse affaire Bettencourt ? Il reste que Nicolas Sarkozy aurait rencontré Monsieur André Bettencourt. Bon. Est-ce que Monsieur André Bettencourt était un délinquant ? Il a été ministre de Mendès-France, il a été plusieurs fois ministre du général de Gaulle, c’était un grand ami de François Mitterrand. (…) Rencontrer Monsieur Bettencourt n’est pas un délit !
Summum du ridicule aux yeux du conseiller spécial, la famille Bettencourt et Nicolas Sarkozy habitaient dans la même ville. Se rencontrer était donc bien naturel :
Il se trouve qu’ils habitaient à Neuilly donc Nicolas Sarkozy les connaissaient depuis très longtemps. Mais en plus, il était maire de Neuilly ! Et qu’il l’ait rencontré ne peut susciter en soi aucune interrogation.
Le Président-candidat ne disait pas autre chose le 3 avril sur Canal Plus, mais dans sa version courte :
J’étais 20 ans maire de Neuilly, ils habitaient à Neuilly … Il a été sénateur pendant que j’étais député, il était dans la majorité, la même que la mienne.
Jusqu’à présent, Monsieur Bettencourt c’est un délinquant ? Ce pauvre homme, qui est mort il y a des années.
Argumentaire en trois points
Sur lelab.europe1.fr
Résumer l'affaire Bettencourt à des rencontres innocentes n'est pas le seul angle d'attaque de Nicolas Sarkozy. Comme nous l'avions décrypté ici, le Président-candidat a developpé un argumentaire bien rodé, en trois points.
1- Sur un ton mi-agacé, mi-indigné, Sarkozy parle de "Commission des comptes de campagne" et de "Conseil constitutionnel" pour prouver sa bonne foi :
Mes comptes de la campagne 2007 ont été vérifiés par la Commission des comptes de campagne, par le Conseil constitutionnel. Ils ont été vérifiés, ils n’ont fait l’objet d’aucune espèce de contestation, vous m’entendez ? D’aucune. En cinq ans !
2- Mais des comptes exemplaires, ce n’est pas suffisant. Nicolas Sarkozy se lance alors dans une série de comparaison dont il a le secret, pour mieux souligner sa blancheur immaculée :
Les comptes de Monsieur Balladur, les comptes de Monsieur Chirac, les comptes de Monsieur Mitterrand … On a dit : "Ah, ils ont dépensé plus", et puis ici ou là y a une somme qui était déclarée en liquide. Pour les miens, Monsieur Apathie, c’est une première, personne ne les a jamais contestés !
3- La comparaison c’est bien, si elle peut permettre de changer de sujet, c’est mieux. Nicolas Sarkozy termine toujours sa démonstration par un renvoi au camp Hollande, et aux financements suspects de certaines fédérations socialistes. En n’oubliant pas de donner quelques directives au journaliste en face de lui :
J’espère que lorsque vous aurez Monsieur François Hollande devant vous, vous lui demanderez pourquoi en dix ans de Parti socialiste il a pu laisser la fédération des Bouches-du-Rhône avec un système mafieux de financement. (…)
Ensuite vous lui demanderez, la deuxième fédération du Parti socialiste, celle du Pas-de-Calais, pourquoi la justice y a … Chacun son bilan ! Moi je n’étais pas trésorier de ma campagne, mais je réponds bien volontiers. Pourquoi deux poids deux mesures ?