Publié à 09h12, le 09 décembre 2015 , Modifié à 09h29, le 09 décembre 2015

Le revirement de Nicolas Sarkozy sur la question de "la ligne" politique de LR

© ERIC FEFERBERG / AFP

Ou comment dire une chose et son exact contraire en l'espace de moins de 24 heures. Entre mardi 8 décembre, devant les députés LR, et mercredi 9 décembre, sur France Inter, Nicolas Sarkozy a fait un tour complet sur lui-même au sujet du débat sur la "ligne" de son parti, entre orientation droitière et retour au centre. 

Avant les élections régionales, l'ancien chef de l'État a arrêté sa stratégie : une offensive à droite toute pour tenter de contrer le FN, dont il avait fait la raison d'être de son retour en politique. Depuis la déception du premier tour pour son parti - le FN en tête dans six régions, LR dans quatre, le PS dans trois -, les critiques internes à son égard se font de plus en plus fortes, d'Alain Juppé à François Fillon en passant par Hervé Mariton. Tous candidats, comme lui, à la primaire de 2016, ils dénoncent l'échec de son positionnement et réclament une réorientation stratégique. Jean-Pierre Raffarin et Nathalie Kosciusko-Morizet, quant à eux, se sont opposés à son refus du front républicain pour le second tour. 

> À lire : Nicolas Sarkozy persona non grata à droite entre les deux tours

Mardi, devant les députés de son parti, Nicolas Sarkozy a donc concédé :

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La question de la ligne politique des Républicains, ce n’est pas le moment. Après [le 13 décembre, ndlr], oui, il y aura un débat à ouvrir.

 

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Pas question de se livrer à l'introspection durant l'entre-deux-tours des régionales, donc, mais il se déclarait tout à fait disposé à en discuter pour l'après. 

Surprise, mercredi sur France Inter : tout ça n'est ABSOLUMENT plus d'actualité. Agacé par les questions sur ce sujet, l'ex-président a ainsi expliqué :

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Ce débat sur la ligne n'a aucun sens. Parfois je me demande si on vit sur la même planète. La question n'est en rien une question de ligne pour savoir si on est plus à droite ou plus au centre. Le nombre de fois où monsieur Cohen ici, avec la pugnacité qui est la sienne, a stigmatisé ou m'a interrogé sur ma 'droitisation', je finis par être où ? La question n'est pas celle-ci. [...]



C'est pas une question de ligne. La question que je pose à vos auditeurs, elle est assez simple : est-ce que la France, ça peut continuer ? Est-ce qu'on peut s'en sortir ? Il y a une angoisse immense dans le pays. On a, depuis 2012, 1.150.000 chômeurs de plus, des déficits abyssaux, on est numéro 2 dans l'OCDE pour le montant des impôts.



Donc les gens se moquent du tiers comme du quart de savoir quelle est la ligne que prônent les uns et les autres. Ils veulent savoir une chose : est-ce que la France de toujours peut rester la France et est-ce qu'on peut sortir, est-ce qu'il y a des solutions ? Et voilà ce que je suis venu essayer d'expliquer : il y a des solutions, qui ne sont pas dans des questions de positionnement, de ligne, de thèmes du Front national ou de se boucher le nez lorsque l'on prononce le mot 'immigration'.

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Circulez, y'a rien à voir. 

Car Nicolas Sarkozy veut parler aux électeurs du Front national. "Le vote FN n'est pas immoral" , a-t-il ainsi lancé, en meeting mardi soir. Et de s'en expliquer ce mercredi sur France Inter, faisant "une différence" entre les électeurs du parti d'extrême droite et les dirigeants de ce dernier :

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D'abord, voulez-vous me dire le nombre de fois où monsieur Hollande, président de la République, socialiste, a reçu madame Le Pen ? Si c'était immoral, pourquoi l'aurait-il reçue ? Quand, dans le Var, le Front national fait 44%, pensez-vous qu'il y a la moitié de la population qui est immorale ? Je vais même dire autre chose que j'assume : je combats le Front national matin, midi et soir. Le Front national m'attaque beaucoup plus que tous les autres réunis. Mais dire que le vote Front national est anti-républicain, ça n'a aucun sens. Parce que si c'était anti-républicain, on se demande pourquoi depuis 30 ans ils ont le droit de se présenter à des élections républicaines.



Je veux dire le vote, hein. Je fais une différence entre le vote Front national, naturellement, et la personne, la nièce, la tante, le grand-père, enfin on s'en sort plus là-dedans.

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Et les centristes ou personnalités centro-compatibles de sa famille politique n'ont qu'à faire avec.



[BONUS TRACK] ALERTE LAPSUS

Front national, front républicain : deux termes qui monopolisent largement le débat politique depuis quelques jours. Et Nicolas Sarkozy, tout à sa logique de faire barrage au premier sans pour autant accepter le second, en perd un peu son latin et confond les deux. À un auditeur pas franchement sympathisant de LR qui l'interrogeait en deuxième partie d'émission sur sa responsabilité dans la montée du FN, l'ancien chef de l'État a ainsi répondu :

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Écoutez-moi bien, Claude. Jamais je n'accepterai, tant que je serai président des Républicains, un accord local, cantonal, régional, national avec le front républicain

 

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Voilà qui est ballot. D'autant plus qu'il ne s'en rend pas compte et qu'il ne se trouve personne, en studio, pour lui signaler son erreur. Enfin, "erreur" : au vu de son refus catégorique du front républicain, élection après élection, on n'est plus si sûr qu'il s'agisse d'un lapsus...