"Tout pour la France" : dans son livre de campagne, Sarkozy éreinte ses concurrents à la primaire

Publié à 20h08, le 22 août 2016 , Modifié à 08h10, le 23 août 2016

"Tout pour la France" : dans son livre de campagne, Sarkozy éreinte ses concurrents à la primaire
Nicolas Sarkozy © VALERY HACHE / AFP

Y'EN AURA POUR TOUT LE MONDE - Il était revenu pour mettre de l'ordre dans une "famille politique" déchirée. Lui, le "rassembleur", allait faire renaître l'UMP de ses cendres, lui redonner une seconde vie sous le nom de Les Républicains. Unie et forte, la droite se dirigeait vers un horizon glorieux : "L'alternance est en marche et rien ne l'arrêtera".

Oui, mais avant ça, il lui faut en passer par une primaire. Ce qui implique que Nicolas Sarkozy ne soit pas le seul à prétendre incarner cette alternance. Juppé, Fillon, Le Maire, Copé, NKM, Mariton, Lefebvre, Morano, Guaino, Myard, Poisson... Ils sont nombreux sur la ligne de départ. Le patron a déjà eu l'occasion de leur dire leurs quatre vérités, plutôt deux fois qu'une.

Et aujourd'hui, il est officiellement candidat. Au terme d'un vrai-faux suspense qui traînait sérieusement en longueur, l'ancien président se déclare officiellement pour la primaire, dans un livre surprise à paraître mercredi 24 août, Tout pour la France. Il quitte donc la présidence du parti dès ce lundi, enfile son costume de candidat et lance encore un peu plus la campagne de la primaire.

Et outre les nombreuses propositions qu'il formule dans ce livre programmatique, Nicolas Sarkozy prend évidemment le temps d'en placer une à chacun de ses concurrents. Et ce même s'il le répète : "Je n'ai aucune revanche à prendre. Aucune querelle d'ego à régler, et surtout pas dans ma famille politique."

# Fillon (et les autres)

Cela commence dès le prologue et les toutes premières pages de cet ouvrage. Juste après la phrase sus-citée, il écrit :

 

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Il m'arrive parfois de sourire en entendant les jugements si critiques de tous ceux qui étaient si enthousiastes à participer à notre action d'hier. Mais j'ai choisi de ne pas y accorder plus d'importance que cela n'en méritait. Les Français jugeront d'eux-mêmes.

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S'il ne cible personne en particulier, cela a l'avantage de s'adresser à à peu près tout le monde. Plusieurs de ses anciens ministres sont en effet candidats à cette primaire et ne se privent pas de faire l'inventaire de son quinquennat. Mais le plus virulent d'entre eux est sans nul doute François Fillon, qui fut relégué au rang de "collaborateur" du temps où il était son Premier ministre. Le mépris ici affiché par Nicolas Sarkozy pour cette attitude le concerne certainement au plus haut point.

# Juppé

Dans le prologue toujours, vient ensuite le tour d'Alain Juppé et de son concept "d'identité heureuse". Nicolas Sarkozy conteste encore une fois avec vigueur cette vision des choses :

 

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Je veux affirmer qu'il n'y a pas d'identité heureuse tant qu'on ne réaffirme pas que l'identité de la France est toujours plus importante que les identités particulières. Il n'y a pas d'identité heureuse quand des milliers de Français nés en France, élevés en France en viennent à haïr à ce point leur patrie. Il n'y a pas d'identité heureuse lorsque les règles de la République sont à ce point bafouées. Il n'y a pas d'identité heureuse lorsqu'on accepte des accommodements 'raisonnables' par souci prétendu d'apaisement. [...]

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"L'identité", lui en fait au contraire le second des cinq chapitres de son livre - et donc l'un des cinq piliers de sa campagne à venir -, au côté de "la vérité", "la compétitivité", "l'autorité" et "la liberté". Il a d'ailleurs réinvesti récemment ce qui est l'un de ses thèmes de campagne favoris, en vantant une France "pays chrétien dans sa culture et dans ses mœurs".

# Copé

Vient ensuite le tour de Jean-François Copé. Le ton est moins violent mais l'une de ses idées centrales, gouverner par ordonnances, fait l'objet d'un long développement très critique de la part de Nicolas Sarkozy :

 

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[Cette procédure] confond vitesse et précipitation en privant le pays d'un débat utile et pédagogique au Parlement. Comment un Président nouvellement élu pourrait-il demander aux Français de lui donner une majorité au Parlement pour immédiatement retirer à celle-ci le pouvoir d'agir ? Cela n'aurait aucun sens.

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Évoquant ensuite la nécessité de ratifier ces ordonnances une fois celles-ci prises, il estime que cela donne lieu à "deux" débats au lieu d'un, "éloignés dans le temps, ce qui donne un espace bien plus important à la contestation sociale". Jean-François Copé président s'apprêterait donc à favoriser les manifs et autres conflits sociaux dans les rues de France, ce qu'il devrait être ravi d'entendre. Sarkozy assène enfin :

 

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Les ordonnances, c'est donc, en fait, reculer pour moins bien sauter. En réalité, je ne goûte guère l'utilisation de ces procédures qui donnent toujours le sentiment aux Français qu'on leur prépare un mauvais coup, ou pire qu'on leur cache quelque chose.

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# Le Maire

Un tout petit peu plus loin, il aborde le sujet du cumul des mandats, lui qui veut réinstaurer la possibilité d'exercer un mandat parlementaire en même temps qu'un mandat exécutif local. Selon lui, une partie des tenants du non-cumul le sont en raison uniquement de "postures" sur le "renouvellement". L'attention de Bruno "le renouveau" Le Maire est donc ici requise :

 

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En général, ce sont toujours ceux qui prônent avec ostentation le renouvellement, le rajeunissement, la rénovation dont les comportements politiques sont les plus conservateurs et les plus convenus. [...] L'âge passe plus vite qu'on ne l'imagine. Il est dangereux d'en faire l'argument unique de sa promotion. La rénovation, je veux dire la vraie, se prouve par la force des idées et l'énergie qu'on est prêt à mettre à leur service. De ce point de vue, je me sens prêt à affronter toutes les concurrences.

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[BONUS TRACK] "J'ai changé", épisode 15.000

Voilà donc Nicolas Sarkozy définitivement et pleinement revenu en politique, même s'il avait franchi le pas en redescendant dans l'arène l'an dernier. Et tout bon come-back s'accompagne nécessairement d'un "j'ai changé" de circonstance. Voici donc celui du Sarkozy cuvée 2016 :

 

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J'ai conscience de la singularité de ma position. J'ai été élu et battu. J'ai connu le pouvoir et l'opposition. J'ai vécu le trop-plein des soirées de victoire et la solitude pesante des lendemains de l'échec. J'ai subi, parfois entretenu la courtisanerie propre à la victoire, et connu la trahison à la seconde où je n'ai plus incarné la perspective du succès. Loin de m'avoir aigri, ces expériences m'ont enrichi. Loin de m'avoir épuisé, elles m'ont renforcé. Loin de m'avoir désabusé, elles m'ont ouvert à la complexité des sentiments et des situations. Loin de m'avoir lassé, elles ont décuplé mon énergie et ma passion. Cela paraîtra sans doute paradoxal, mais j'avais besoin de traverser ces épreuves pour mieux saisir l'essentiel de la vie et des êtres humains.

"

Du rab sur le Lab

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