Après 17 heures de débats en commission des lois, les députés avaient adopté une première version du projet de loi sur la moralisation de la vie publique (qui n’est plus son nom officiel puisqu’il a beaucoup varié), votant le casier judiciaire vierge pour les élus et les ministres, supprimant les emplois familiaux mais aussi la réserve parlementaire. Mais pas la réserve ministérielle, au grand dam des oppositions.
Mais lors de son premier jour de débats dans l’hémicycle lundi 24 juillet, la loi moralisation a déjà évolué en même temps que le gouvernement et le groupe LREM, majoritaire. Ainsi, après avoir défendu la réserve ministérielle en commission, critiquée tout autant que la réserve parlementaire pour son opacité et son potentiel clientéliste, le gouvernement et la majorité ont changé d’avis. Ainsi La ministre de la Justice Nicole Belloubet a finalement donné un avis favorable du gouvernement à un amendement LREM supprimant cette manne financière. "Vous vous attachez notamment à la question de la réserve ministérielle, donnant ainsi le sentiment d'un donnant-donnant et d'un parallélisme" avec la réserve parlementaire, a dit la ministre aux députés, lors des débats sur les deux projets de loi de "confiance dans la vie publique".
Pourtant, en commission, députés LREM comme la ministre – qui a récemment découvert l’existence de cette réserve ministérielle avant de la défendre maladroitement - étaient favorables au maintien de cette réserve. Et les députés LREM avaient voté son maintien.
Un revirement à voir en vidéo ci-dessous, isolée par LCP :
#Urgent@NBelloubet se range à l'avis des députés et se dit "favorable" à la suppression de la réserve ministérielle #directANpic.twitter.com/2bZv1To2Ka
— LCP (@LCP) 24 juillet 2017
Appelant à "écarter les fantasmes", Nicole Belloubet a rappelé que la réserve ministérielle "correspond à une application normale des principes budgétaires". Cette réserve "correspond à des crédits inscrits dans la mission collectivités territoriales" gérés par le ministre de l'Intérieur, a-t-elle indiqué, soulignant que son montant était "en diminution constante et rapide : 19 millions en 2013, 5 millions en 2017". "J'ai toutefois bien compris que certains d'entre vous souhaitent supprimer cette ligne budgétaire, pour des raisons de parallélisme des formes et pour des raisons qui pourraient être considérées comme une exigence d'éthique partagée", et donc, "le gouvernement donnera un avis favorable à cette suppression de la réserve ministérielle", a-t-elle dit, déclenchant des applaudissements nourris dans l'hémicycle, y compris à la gauche de la gauche, chez les Insoumis.
Des élus de tous bords avaient protesté peu avant contre la suppression de la réserve parlementaire, dont disposent députés et sénateurs pour attribuer des subventions à des associations ou des collectivités, régulièrement critiquée comme une pratique "clientéliste". Des députés de plusieurs bords, y compris MoDem, avaient défendu une telle mesure pour la "réserve ministérielle" pour que l'exécutif n'échappe pas à une réforme visant les seuls parlementaires initialement.
Plus globalement, l'Assemblée s'est donc attaquée ce lundi à "la confiance dans la vie publique" avec deux projets de loi déjà objet d'âpres débats, des élus de droite et de gauche disant craindre une "stigmatisation des élus" et un "coup de com" du gouvernement. Avec ces textes "ni punitifs, ni vindicatifs", dans l'hémicycle jusqu'à jeudi après leur large adoption au Sénat, il s'agit de faire en sorte que les élus "ne soient plus cloués au pilori en raison du comportement de quelques-uns", a lancé la garde des Sceaux, Nicole Belloubet. Dans la soirée, les députés ont débattu de l'article 1er du projet de loi ordinaire, portant sur l'inéligibilité en cas de manquements à la probité. Ils ont voté un amendement LREM renforçant les sanctions, mais en revenant sur le casier judiciaire vierge, des élus de droite comme de gauche dénonçant un "recul" sur un engagement du candidat Macron.
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