Voilà qui ne risque pas d’arranger l’image que Nicolas Sarkozy a de Patrick Buisson, son ancienne éminence grise reniée par l’ancien président après la révélation des enregistrements clandestins réalisés par son ex-conseiller officieux à l’Elysée.
Dans un livre des journalistes du Monde Ariane Chemin et Vanessa Schneider à paraître jeudi 19 mars (Le Mauvais génie, Fayard), dont le quotidien du soir publie les bonnes feuilles (article payant) ce mardi, les deux auteurs révèlent que Patrick Buisson affublait Nicolas Sarkozy de surnoms bien peu flatteurs… à l’époque même où il était à son service à l’Elysée.
Selon le duo Chemin-Schneider, il n’était pas rare que l’ancien journaliste de Minute devenu conseiller officieux du chef de l’Etat qualifie en ces termes son bienfaiteur devant son entourage : "le Nain", "le Petit", "talonnettes", "le zinzin" ou encore "tête creuse".
Une fois, écrivent les auteurs, Patrick Buisson lâche ces mots agacés devant ses convives, à l’issue d’un entretien téléphonique avec Nicolas Sarkozy :
Il ne peut rien faire sans moi, Naboléon.
Le livre C’était pas le plan, paru en octobre 2014 chez Fayard, rapportait une scène similaire. Les journalistes Philippe Cohen et Laureline Dupont y décrivaient un Patrick Buisson dérangé par un coup de fil du chef de l’Etat, lors d’un déjeuner en 2008 :
À peine attablé, Buisson reçoit un coup de téléphone. 'Allo ?'... 'Tu me fais chier, je suis en train de déjeuner !' Vlan ! Buisson raccroche. À son compagnon de table qui le regarde médusé, il lance, détaché : 'C’est Sarko, je ne suis pas son valet à ce nabot, il veut que j’aille à Villacoublay'.
Un vocabulaire, confirmé par le Mauvais génie de Chemin et Schneider, révélateur du rapport de domination qu’a installé Patrick Buisson avec Nicolas Sarkozy après l’accession à l’Elysée de ce dernier en 2007. Car à en croire les deux journalistes, le leader de la droite ne soupçonnait pas le peu d’estime que lui portait son homme de l’ombre, celui qu'il louait comme un "homme unique".
Pendant tout son quinquennat, l’ex-chef de l’Etat s’est appuyé sur les conseils (souvent tarifés, via sa société de sondages) de Patrick Buisson, qu’il considérait comme l’un des artisans majeurs de sa victoire présidentielle.
Mais l’éminence grise est tombée en disgrâce en mars 2014, quand la presse a révélé que Patrick Buisson avait enregistré Nicolas Sarkozy à son insu à de nombreuses reprises lors de son mandat. Une "trahison" qui lui a valu d’être renié et attaqué en justice par l'ex-locataire de l'Elysée.