Il n'est plus cumulard. Enfin, un tout petit peu quand même. Mais il est en tous cas devenu un vibrant défenseur du non-cumul des mandats. Et voir sa famille politique préparer une loi revenant sur cette mesure, voulue par Hollande et qui s'appliquera à partir des législatives de 2017, voilà qui indigne Xavier Bertrand.
Aujourd'hui président de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, l'ancien ministre de Nicolas Sarkozy rate rarement une occasion de critiquer les intrigues et préoccupations de "salons parisiens", qui concernent autant la gauche que la droite. Mais sur le cumul, c'est son camp qui fait office de cible. Car lui président de région, comme son directeur de campagne et proche soutien Gérald Darmanin ou la maire LR de Calais Natacha Bouchart, ont décidé de renoncer à certains de leurs mandats pour privilégier le conseil régional. Interrogé sur le sujet lundi 4 janvier sur Europe 1, Xavier Bertrand embraye immédiatement sur ce projet de loi que la droite sénatoriale serait d'ores et déjà en train de préparer dans l'optique d'une victoire à la prochaine présidentielle. Il fulmine :
"On ne donne de leçons à personne mais je crois que de toute façon, le cumul des mandats il est mort. Il est mort et il faut que chacun le comprenne. Et quand j'entends cette folie qui consisterait à dire qu'au lendemain de 2017, une nouvelle majorité de droite, la première mesure qu'elle prendrait, ça serait de permettre à nouveau le cumul des mandats, mais ils ont rien compris !
[...] J'espère vraiment que ça ne sera pas [dans le programme présidentiel de la droite]. Vous imaginez le message ? Ça serait de dire aux Français : 'On sait que vous avez des problèmes mais on va s'occuper de nous en rétablissant le cumul des mandats'. Les Français veulent une seule chose : qu'on s'occupe d'eux, c'est pas compliqué !
"
Le 22 décembre, France Info révélait en effet que Les Républicains travaillaient sur un texte en ce sens, pour pouvoir le dégainer avant même les législatives post-présidentielle. Gérard Larcher, président du Sénat, et Bruno Retailleau, chef de file des sénateurs LR, plancheraient sur le sujet. Le premier n'a d'ailleurs pas démenti l'information le lendemain, malgré plusieurs perches tendues. Et d'après Le Canard Enchaîné, Nicolas sarkozy aurait promis aux parlementaires LR de revenir sur le non-cumul, promesse visant à s'attacher leur soutien en vue de la primaire de la droite et du centre, qui aura lieu en novembre.
Ce qui a tout pour énerver Xavier "anti-système" Bertrand. Qui, de son côté, a démissionné de son mandat de maire mais aussi de celui de député (et a abandonné la course à la primaire). Il restera tout de même conseiller municipal de Saint-Quentin (Aisne) ainsi que président d'agglomération. Gérald Darmanin, quant à lui, a également quitté l'Assemblée nationale pour occuper son mandat de conseiller régional car de toute façon, "ça ne sert pas à grand chose d'être député". Natacha Bouchart, enfin, a démissionné de son mandat de sénatrice pour devenir vice-présidente de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie.
[BONUS TRACK] La petite phrase anti-petites phrases
Faire de la politique autrement, c'est aussi rompre avec la si forte tentation des "petites phrases" qui alimentent la chronique. Comme de nombreux autres avant lui, Xavier Bertrand ne veut plus de ça... et le dit tout en s'adonnant à ce péché mignon. Toujours sur Europe 1, l'ancien ministre est interrogé sur un scud de Nicolas sarkozy après les régionales, qui l'ont vu triompher avec l'aide de la gauche, tout comme Christian Estrosi. "Il faut attendre qu'ils dessoûlent. Ça prendra deux mois. [...] Ils sont atteints du syndrome de Stockholm : ils sont tombés amoureux de la gauche qui les a pris en otage", leur avait lancé le patron de LR.
Xavier Bertrand lui répond donc en direct à la radio ce lundi :
"J'aimerais bien que certains rompent avec l'ivresse - l'ivresse - des petites phrases. Parce que ces petites phrases, elles servent vraiment à rien dans le débat politique et il y a quand même beaucoup plus important à faire quand on voit les difficultés de nos concitoyens.
"
"Dessoûlent" / "ivresse", vous l'avez ? Mais non, grand dieu non, il ne s'agit pas là d'une petite phrase, comme le montre parfaitement son insistance sur le mot "ivresse" dont il semble très fier.