Budget : Mediapart publie la lettre de Bruxelles à la France, que Hollande refuse de rendre publique

Publié à 15h54, le 24 octobre 2014 , Modifié à 13h34, le 25 octobre 2014

Budget : Mediapart publie la lettre de Bruxelles à la France, que Hollande refuse de rendre publique
François Hollande © REUTERS/Alain Jocard/Pool

BUDGETLEAKS - "C'est une lettre très banale et on peut ne pas publier des lettres très banales qui  demandent simplement de l'information et qui demandent à poursuivre le dialogue." C'est ainsi que François Hollande justifie son refus de rendre publique la lettre de la Commission européenne adressée au ministre des Finances Michel Sapin, au sujet du projet de budget de la France pour 2015.

Un courrier reçu en début de semaine par Paris, alors que Bruxelles pourrait émettre un "avis négatif" sur le projet de budget français, actuellement en discussion à l'Assemblée nationale. C'est d'ailleurs du palais Bourbon qu'émanent des demandes de publication de cette lettre. Plusieurs députés socialistes (mais aussi Florian Philippot, vice-président du FN) ont en effet exigé vendredi 24 octobre la mise au jour du contenu de cette missive, au nom de la "transparence".

Voici ce qu'écrivent dans leur communiqué ces élus du courant Cohérence socialiste, à savoir Valérie Rabault (rapporteure générale du budget), Karine Berger (secrétaire nationale du PS à l'Économie), Yann Galut, Alexis Bachelay et Colette Capdevielle :

Nous demandons au président de la République française que la lettre reçue par la France soit immédiatement publiée, afin que les Français puissent connaître les points de discussion entre leur pays et la Commission européenne.



Dans un contexte de crise politique, alors que nos concitoyens font preuve d’un euroscepticisme croissant et dénoncent l’obscurité des procédures européennes, cette publication serait un geste fort démontrant que la France entend jouer la carte de la transparence démocratique.



Le budget de la France relève de sa pleine souveraineté et aucune mesure visant à réduire notre déficit structurel (corrigé de l’impact de la conjoncture) et qui aurait comme conséquence d’empêcher la nécessaire lutte contre la déflation, ne peut nous être imposée.

Mais alors que François Hollande, depuis Bruxelles où se tient un sommet européen, se borne à indiquer que "le dialogue avec la Commission se poursuit dans de très bonnes conditions", c'est Mediapart qui a accédé à la demande des parlementaires français. Le site d'information publie ainsi le verbatim de la lettre envoyée à Paris, alors que la France prévoit un déficit de 4,3 % fin 2015, un chiffre bien éloigné des 3% imposé par les traités européens.

Dans cette lettre "banale", Jyrki Katainen, commissaire européen aux affaires économiques et monétaires, écrit ainsi à Michel Sapin :

Je vous écris pour vous demander les raisons qui ont conduit à ce que la France prévoie de dévier des objectifs budgétaires fixés par le Conseil, en ce qui concerne à la fois le déficit public général, et l'ajustement de l'équilibre structurel en 2015. Je voudrais également savoir comment la France prévoit de se conformer à ses obligations de politique budgétaire en 2015, conformément au pacte de stabilité et de croissance.

Bruxelles s'inquiète du non-respect par la France de ses engagements, mais précise vouloir "poursuivre un dialogue constructif" avec les autorités françaises. François Hollande a indiqué, jeudi soir, que la France respecterait ses "engagements européens, mais avec le maximum de flexibilité", réaffirmant qu'il n'irait pas plus loin que les 21 milliards d'euros d'économies prévues pour l'année 2015. 

Jyrki Katainen demande donc que Paris lui transmette au plus vite ses "positions", "si possible" dès ce vendredi, afin de se prononcer sur le budget de la France.

D'après notre analyse préliminaire […], l'ajustement du déficit structurel devrait ressortir à un niveau bien inférieur au niveau recommandé. Dès lors, tout porte à croire que l'ébauche de programme budgétaire pour 2015 prévoit de manquer aux obligations budgétaires qui découlent des recommandations du Conseil, sous la procédure de déficit public excessif.

François Hollande et son gouvernement sont donc invités à expliquer leur choix de laisser filer les déficits de la France. La Commission examinera ces précisions pour finaliser un avis, et éventuellement prononcer des sanctions, en l'occurrence une lourde amende. Or, "depuis la signature du Pacte de stabilité, en 1997, aucun pays ne s'est jamais vu infliger de sanction pour non-respect des règles de dette et déficit", précise le Huffington Post.

Quatre autres pays ont reçu un courrier similaire de la part de Bruxelles : l'Italie, l'Autriche, la Slovénie et Malte. À l'heure actuelle, seule l'Italie, via le compte Twitter de son ministère des Finances, a publié le contenu de cette lettre (une capture d'écran du courrier) :

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