Le torchon brûle pour de bon entre Gérard Larcher et Claude Bartolone. Le premier, président UMP du Sénat, a considéré qu’il ne lui était "plus possible" de travailler avec le second, son homologue socialiste de l’Assemblée nationale, dans une déclaration à l’AFP jeudi 29 novembre. Le patron de la chambre haute du parlement s’est expliqué sur ce qu’il qualifie de "profond désaccord de conceptions institutionnelles" :
"M. Bartolone a fait ce matin une déclaration sur sa volonté de faire disparaître le Sénat en tant qu'institution parlementaire, à un moment au contraire où il aurait dû avoir une attitude propice au rassemblement et à l'unité, selon le vœu du Président de la République.
"
Gérard Larcher a donc annoncé que le Sénat ne travaillerait plus en tandem avec l’Assemblée nationale sur la mission de réflexion sur "l’engagement républicain" confiée conjointement aux deux chambres par François Hollande après les attentats contre Charlie Hebdo.
Invité ce jeudi matin de BFMTV, Claude Bartolone a effectivement préconisé la suppression du Sénat "sous la forme telle qu’on la connaît aujourd’hui". Voici ce qu’il a déclaré :
"Et je le redis, je vais pas faire plaisir à mes amis sénateurs, mais moi je suis pour la fin du bicamérisme sous cette forme, le rapprochement entre le conseil économique et social et le Sénat, pour avoir un Bundesrat à l’allemande qui s’intéresserait beaucoup plus au long terme.
"
De fait, ce n’est pas la première fois que Claude Bartolone se prononce pour une réforme du modèle français de bicamérisme. Dans son livre paru le 8 octobre, Je ne me tairai plus, la fusion Sénat-CESE figurait en bonne place parmi une série de propositions de bouleversements institutionnels. Tout juste de retour à la tête de la chambre haute, après la victoire de la droite aux sénatoriales, Gérard Larcher n’avait alors pas réagi.
C'est donc l'apothéose de 48 heures de tension entre les deux hommes. Mercredi, le bureau du Sénat avait rejeté la fusion des chaînes Public Sénat et LCP, provoquant une réplique agacée de Claude Bartolone. Et ce jeudi matin, ce dernier était sermonné par Gérard Larcher en raison de son boycott d'une cérémonie de remise de prix à un élu FN.
[EDIT 15h50] Le Roux demande à Larcher de "revenir sur sa décision"
Réagissant par communiqué ce jeudi après-midi, le président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale Bruno Le Roux "déplore la décision" de Gérard Larcher. D'autant que celle-ci, estime-t-il, se base sur un "prétexte fallacieux". Il écrit :
"Le prétexte invoqué, l'interrogation sur notre système bicamériste, est fallacieux. La mission ne porte pas sur l'organisation de nos institutions, mais sur les voies et moyens que doit trouver la République pour renforcer ce qui concourt à son unité et à la transmission des ses valeurs. C'est l'essence même de nos deux Assemblées que de travailler ensemble à ce renforcement de la République.
"
Et Bruno Le Roux de demander à Gérard Larcher et au Sénat de "revenir sur leur décision", au nom du "sursaut national du 11 janvier".
[Edit 20h] Le Roux : Larcher n'est "pas à la hauteur"
Interrogé plus tard par LCP, le député de Seine-Saint-Denis va plus loin. Il estime que Gérard Larcher "n'est pas à la hauteur du moment que nous vivons" et fait preuve par sa décision d'une "attitude très politicienne". Il l'accuse d'opportunisme, estimant que le président du Sénat "profite d'une déclaration [de Claude Bartolone] qui ne poserait aucun problème dans un autre contexte". "On a l'impression que monsieur Larcher cherchait une excuse pour ne pas travailler avec l'Assemblée", ajoute-t-il.
Une réponse à retrouver dans cette vidéo de LCP :