DEUXIÈME SERVICE - La première balle était restée dans le filet. Deuxième balle pour les députés du Front de Gauche. Le public retient son souffle. Mais on sent bien que ce second service risque d'être un peu court, lui aussi... Alors que le gouvernement s'apprête à faire usage de l'article 49-3 sur la loi Macron, qui revient en débat en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale mardi 16 juin à l'Assemblée nationale, les troupes d'André Chassaigne vont tenter, pour la deuxième fois, de déposer une motion de censure contre le gouvernement.
En février dernier, lorsque Manuel Valls avait engagé la responsabilité de son gouvernement sur ce texte en première lecture, ils avaient légèrement raté leur coup. Car pour être déposée, une motion de censure doit être signée par un dixième des députés, soit 58 parlementaires. Or, les députés FdG sont au nombre de 10, au sein du groupe GDR (Gauche démocrate et républicaine) qui compte une quinzaine d'élus. Avec l'écologiste Isabelle Attard, ils avaient en vain tenté de convaincre les socialistes frondeurs de co-signer leur motion, sans succès. Ils s'étaient alors ralliés à celle de l'UMP et de l'UDI, finalement rejetée par l'Assemblée.
Mais ils sont toujours autant déterminés et retentent leur chance. Dans un communiqué diffusé lundi 15 juin, les députés FdG fulminent contre le gouvernement qui recourt au 49-3 "pour échapper à toute discussion sur le projet de loi Macron et ne pas affronter les véritables opposants au texte". Et d'appeler "tous les députés progressistes" à rejoindre leur initiative :
"Sans conteste, cette procédure est dirigée contre la gauche. C'est pourquoi nous adressons à tous les députés progressistes une motion de censure que nous leur proposons de cosigner. Il est temps que la gauche s'insurge contre ces artifices de procédure et mette fin aux postures qui voudraient laisser croire que la politique du gouvernement est différente de celle que mènerait la droite.
"
Un message clairement adressé aux frondeurs, qui malgré la soi-disant "unité" affichée au congrès du PS à Poitiers il y a 10 jours, continuent leur combat sur le texte porté par Emmanuel Macron. Ils estiment d'ailleurs avoir été "blacklistés" des débats en commission au Palais Bourbon, dénonçant un "délit de sale gueule" à leur encontre. Une colère qui vise clairement le président du groupe, Bruno Le Roux, et donc Solférino et le gouvernement. Probablement pas suffisant, cependant, pour les pousser à signer cette motion de censure du Front de Gauche.
Et si, comme il y a quatre mois, le chef de file de l'opposition parlementaire, Christian Jacob, a lui aussi annoncé le dépôt d'une motion de censure ce lundi, les élus du FdG comptent bien ne pas connaître un nouvel échec. Ainsi argumentent-ils :
"Le gouvernement va nous priver de discussion sur un texte, qui symbolise à lui seul la dérive libérale d'une majorité pourtant censée incarner une alternative à la politique de Sarkozy et mener une guerre contre la finance. Sans compter toutes les mesures régressives introduites par la droite au Sénat et par le gouvernement, au cours de cette nouvelle lecture.
"
Leur obstination pourrait toutefois se heurter, cette fois-ci encore, à leur manque d'effectif. Reste à savoir si, en cas de double faute, ils se rangeront à nouveau à la motion de censure de Les Républicains.
[Edit 19h25]
Dans un post de blog publié en fin d'après-midi, Jean-Luc Mélenchon apporte son soutien à la démarche des députés du Front de Gauche. Il appelle également les élus du PS à rejoindre cette initiative, estimant que "la chute du gouvernement Valls est nécessaire" pour "faire respirer le pays" :
"Je soutiens pleinement les parlementaires de gauche opposés à la loi Macron qui s’unissent pour déposer ensemble une motion de censure. J’appelle les députés socialistes à se joindre à l’opposition de gauche pour censurer le gouvernement Valls et sa politique anti-sociale.
La chute du gouvernement Valls est nécessaire pour construire un avenir social, écologique et démocratique dans notre pays. Il faut censurer Valls pour faire respirer le pays.
"
[Edit 16 juin] Le texte de la motion de censure
Voici le texte de la motion de censure déposée par les députés Front de gauche :