CAMBALLEZBYE - C'est devenu assez rare pour être noté : en ce moment, à peu près tout le monde au Parti socialiste est d'accord. Bonne nouvelle ? Pas forcément puisque si l'unanimité est pour une fois de mise à Solférino, c'est pour juger que le parti doit faire sa révolution. Et la façon dont cela doit se faire (avec qui et sur quelle ligne ?) divise évidemment les socialistes.
L'actuel Premier secrétaire du PS, par exemple, se verrait bien rester en poste à l'occasion de la grande "clarification" qui s'annonce. Dès l'élimination brutale de Benoît Hamon au premier tour de la présidentielle, Jean-Christophe Cambadélis a avancé ses pions et plaidé pour une "reconstruction voire une refondation" du PS, actant la "mort" du "parti d'Épinay" et montrant clairement son intention d'être le grand gagnant des grandes manœuvres à venir. Mais comment faire la révolution en gardant les mêmes structures dirigeantes ?, se demande en substance Thierry Mandon dans les colonnes de L'Opinion ce 28 mai.
L'ancien ministre de François Hollande, interrogé sur la volonté de "Camba" de "tout changer" au PS, estime ainsi que ce dernier doit commencer par laisser la place :
"Il a précisé qu’il fallait tout changer mais qu’il resterait au centre de ce changement. C’est surprenant. Tout changer, cela passe aussi par un changement de direction, pour pouvoir passer le relais à une nouvelle génération.
"
Ce n'est pas du dégagisme, mais pas loin. Lui-même ne se représente pas aux législatives du mois de juin, après avoir démissionné de ses postes de conseiller général de l'Essonne et de maire de Ris-Orangis pour anticiper sur l'interdiction du cumul.
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Selon lui, la rénovation du parti ne doit pas attendre un futur congrès qui aurait lieu à l'automne. Thierry Mandon plaide ainsi pour la nomination d'une "direction collégiale" du PS dès le "soir des législatives", avec "des dirigeants de la nouvelle génération", proposant même quelques noms :
"Il faudrait, au soir des législatives, nommer une direction collégiale de six à huit responsables. Des dirigeants de la nouvelle génération, comme Najat Vallaud-Belkacem, Matthias Fekl, Olivier Faure ou Guillaume Balas et de jeunes élus locaux. Ils devraient avoir la charge de conduire des assises de la reconstruction, embrassant toutes les questions, ouvertes largement sur la société et qui pourrait préparer un congrès fondateur d’un nouveau Parti socialiste, démocratique, social et écologique. Sans se précipiter.
"
Et cela passe donc par pousser Cambadélis dehors, ce qui ne sera pas forcément chose aisée puisque le député de Paris, qui mène actuellement une campagne législative sous tension, a bien l'intention de "faire de la politique jusque dans [sa] tombe". Interrogé sur cette sortie de Thierry Mandon sur franceinfo ce lundi, il a d'ailleurs commencé par faire mine de s'en amuser, avant d'annoncer qu'il "ferai[t] des propositions le 18 juin" et de moquer l'isolement de son détracteur du jour :
"La première des propositions, c'est qu'il n'y a pas de refondation s'il n'y a pas de retour à l'esprit collectif. Les génies de village qui font des déclarations dans leur coin, pour leur pomme, alors qu'ils ne seront pas candidats, devront quand même prendre en compte l'esprit collectif. Et le deuxième élément, c'est que maintenant, les militants doivent pouvoir intervenir dans ce qui sera la refondation. Il faut un processus collectif et je m'y emploierai.
"
Sur le fond, Thierry Mandon dit vouloir "reconstruire un parti d’aujourd’hui". "Cela veut dire d’abord savoir s’extraire de la pratique bipolaire dans laquelle s’est enfermée la vie du parti depuis des années, entre opposition dure et pratique molle au gouvernement. Cela va bien au-delà du dernier quinquennat", considère l'ex-secrétaire d'État chargé de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Qui prône aussi un retour au "travail" sur les sujets de fond. Il raconte ainsi avoir été "effaré", durant son passage au gouvernement "de constater que personne n’avait véritablement réfléchi depuis longtemps au rôle de l’État en France". Et d'ajouter :
"Le PS doit redevenir un véritable creuset intellectuel. Il faut débattre en profondeur de certaines questions, commander des analyses à des laboratoires universitaires, bref travailler, et avec méthode. Nous sommes dans une société de plus en plus diplômée, où le niveau de formation n’a cessé de s’élever. Les débats au sein du parti doivent être à la hauteur.
"
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[EDIT 9h55 : ajout réponse Cambadélis.]
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