Emmanuel Macron voulait frapper un grand coup, samedi 4 février, avec un grand meeting lyonnais et ce alors que Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen sont également de sortie dans la "ville des Lumières" ce dimanche. A piori plutôt réussi, au vu de l'affluence et de l'impact médiatique de l'événement. Mais comme à peu près chaque fois qu'il s'exprime, l'ancien ministre de l'Économie a eu des propos qui lui ont été instantanément reprochés.
Cette fois-ci, cela concerne sa volonté d'investir autant de femmes que d'hommes aux législatives, et sa façon de s'opposer au revenu universel prôné notamment par Benoît Hamon. Et les critiques sont parfois teintées de mauvaise foi, voire totalement infondées.
# Sur la parité aux législatives
La parité femmes-hommes en politique, c'est franchement pas ça, à droite comme à gauche. Le leader d'En Marche !, lui, en fait un impératif pour la désignation des futur(e)s candidat(e)s de son mouvement aux législatives de juin. Au Palais des Sports de Lyon, il a ainsi expliqué :
"Notre exigence pour mener ce combat, ce sera une exigence de renouvellement. C'est pour cela que je veux qu'au moins la moitié de nos candidats puissent être des femmes et que je vous demande à vous qui êtes là, qui nous entendez, qui nous suivez, de vous engager, de prendre ce beau risque pour faire vivre notre démocratie.
[...] Parce que ce renouvellement, celui qui permettra à des candidates de se présenter, celui qui fait que nous présenterons 50% de nouveaux candidats, c'est simplement reconnaître la vitalité de notre société, sa force. Ça n'est pas pour faire plaisir aux uns ou aux autres. C'est simplement de donner la chance à notre pays de gouverner et de légiférer comme il est, tout simplement.
"
Un propos à revoir en vidéo :
Quelques voix se sont élevées contre cet emploi du mot "risque" en lien à la question de la représentativité des femmes en politique. Notamment la militante féministe Caroline De Haas, ex-directrice de campagne de Cécile Duflot (EELV), ou encore l'élue socialiste d'Île-de-France Marie-Pierre de La Gontrie :
Selon Macron, les femmes politiques représentent un risque ! Les mecs, sérieusement, vous relisez vos discours ? pic.twitter.com/VvCN2J0lLl
— Caroline De Haas (@carolinedehaas) 4 février 2017
Femme et élue ...je suis un risque ! Quel propos humiliant pic.twitter.com/plQs8oWp7n
— mpdelagontrie (@mpdelagontrie) 4 février 2017
Elles réagissaient à ce tweet d'Emmanuel Macron qui reprenait son propos :
Je veux qu’au moins la moitié de nos candidats aux législatives puissent être des femmes. #LaFranceEnMarchehttps://t.co/sEg6XNjPrVpic.twitter.com/bZGb0RF4ZW
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 4 février 2017
Or il semblerait bien qu'il s'agisse ici d'une vraie mauvaise interprétation : Emmanuel Macron parlait du "risque" que l'engagement politique peut représenter pour tout un chacun et en l'occurrence les femmes, en ce qu'il implique des sacrifices professionnels, financiers, familiaux, etc. Son propos ne visait pas à présenter l'investiture de candidates comme un "risque" pour un mouvement politique.
# Sur le travail
S'opposant au revenu universel de Benoît Hamon et défendant sa vision d'une société construite sur la valeur travail ("Nous sommes, nous serons, les défenseurs du travail", a-t-il affirmé), il a d'abord flingué : "Quand je vous parle de défendre le travail, je m'oppose à un projet qui voudrait que la promesse faite à chacune et à chacun, ce serait de pouvoir vivre dignement dans une oisiveté subie ou choisie." Ce n'est *pas exactement* ce que propose le vainqueur de la primaire du PS, mais passons.
Puis, racontant son déplacement à la rencontre des habitants de Noeux-les-Mines (Pas-de-Calais) à la mi-janvier, au cours duquel il avait eu une phrase sur le tabagisme et l'alcoolisme qui lui avait valu des accusations de "mépris social", il a expliqué : "Ils ne m'ont pas demandé le revenu universel, ils l'ont, ça s'appelle le RSA. Et si on savait le multiplier par 2, j'ose espérer qu'on l'aurait fait depuis longtemps. Ils m'ont demandé du travail, la possibilité de vivre dignement de leur travail."
Enfin, il a assuré que ses propositions - suppression du RSI, allègement des "cotisations payées par les salariés" et le fait de "rendre la prime d'activité et le RSA plus incitatifs à la reprise d'activité" - permettraient de faire en sorte que "tous les travailleurs, quel(le) que soit leur statut ou leur catégorie, gagneront en pouvoir d'achat durant [son] quinquennat".
Et de lancer, non sans rappeler un Nicolas Sarkozy ou un Laurent Wauquiez :
"Parce que comme vous, je ne veux plus entendre dans notre pays qu'il est plus intéressant de faire autre chose que de travailler.
"
C'est cette dernière phrase qui a suscité de nombreuses remarques critiques, certaines ironiques, d'autres beaucoup plus sérieuses. Ce tweet neutre d'une journaliste de Slate a notamment beaucoup circulé :
"Je ne veux pas entendre qu'il est plus intéressant de faire autre chose que de travailler" #MacronLyon
— Aude Lorriaux (@audelorriaux) 4 février 2017
Et maintenant, laisse moi te dire un truc. En soi, le travail, on s'en branle. C'est un moyen de faire autre chose, justement.
— Padre_Pio (@Padre_Pio) 4 février 2017
Oui c'est tellement intéressant d'être vigile dans une grande surface https://t.co/GEDg7K8ZyW
— Max Grmn (@MaximeGrmn) 4 février 2017
Le principe est un peu le même que ce que l'on a vu plus haut : sortie de son contexte, la phrase laisse penser que selon Emmanuel Macron, la vie doit se résumer au labeur et qu'aucune autre occupation ne doit être considérée comme "plus intéressante" que le travail. Mais pour malheureuse et politiquement contestable qu'elle soit, cette formule vise en fait "l'intérêt" financier du travail par rapport à celui de l'inactivité. Comprendre : lui veut que les prestations sociales ne soient que des incitations à travailler, et non des supplétifs trop *confortables* pour leurs bénéficiaires. À ce sujet, on ne peut que conseiller à tout le monde de regarder cette mise au point sur le mythe de l'assistanat :
[EDIT 06/02] Contrairement à ce que nous avions indiqué par erreur, Caroline de Haas n'est pas membre de la campagne de Benoît Hamon.