ALWAYS LOOK ON THE BRIGHT SIDE OF LIFE - S'il y a bien une chose que les élus FN détestent, c'est la récupération d'un drame humain à des fins politiques. Il n'y a qu'à voir comment certains ténors du parti se sont insurgés contre les tentatives de récup' des tenants du "remain" après l'assassinat de la députée britannique Jo Cox, quelques jours avant le référendum sur le Brexit au Royaume-Uni. Cela n'empêche pas le parti de Marine Le Pen de surfer sur des événements tragiques, comme ce fut le cas après les attentats du 13 novembre par exemple. Mais détourner un événement terrible à des fins électorales est un jeu auquel le FN refuse de se livrer en théorie.
Il était donc un tout petit peu surprenant de découvrir dans La Voix du Nord, lundi 27 juin, ces propos prêtés à Bruno Bilde, adjoint à la mairie FN d'Hénin-Beaumont et conseiller spécial de Marine Le Pen :
"Avec le terrorisme, on ne sait pas quels événements peuvent encore intervenir et donc dans quel état d’esprit sera le peuple français d’ici à avril 2017. On peut avoir une bonne surprise.
"
Des propos qui ont "choqué" l'élue d'opposition à Hénin-Beaumont Marine Tondelier (EELV). Cette dernière réclame par ailleurs des excuses de la part de l'élu frontiste :
Extrêmement choquée par propos @BrunoBilde dans @lavoixdunord /Des excuses seraient un minimum... #FN#HéninBeaumontpic.twitter.com/g3QDtnUaLR
— Marine Tondelier (@marinetondelier) 28 juin 2016
Contacté par le Lab, Bruno Bilde s'insurge. Il explique que ses propos ont été tronqués et s'en prend ouvertement aux journalistes du quotidien local :
"Ces voyous de 'La Voix du Nord', il y en a assez.
"
Et l'élu FN d'expliquer qu'après avoir parlé de terrorisme et avant d'évoquer une "bonne surprise", il a évoqué "le réveil des peuples européens", comme l'a illustré selon lui la victoire du Brexit lors du référendum organisé le 23 juin au Royaume-Uni. Il manquerait donc une partie de son propos entre les deux phrases rapportées par le quotidien local, ce qui changerait grandement le sens de cette citation. En conséquence, Bruno Bilde a écrit un droit de réponse à La Voix du Nord. "S'ils ne le publient pas, je me réserve le droit d'agir en justice", prévient-il.
Dans sa lettre adressée à La Voix du Nord, Bruno Bilde explique que les propos qui lui sont prêtés ne reflètent en aucune manière ses idées. L'ancien mégrétiste écrit :
"Vous oubliez tout un passage ou j’évoque le réveil des peuples dans un certain nombre de pays européens comme l’Autriche, l’Angleterre ou l’Allemagne. La version que vous présentez conduit à faire penser que la bonne surprise pourrait venir d’événements terroristes. Non seulement, je n’ai jamais dit cela mais cela est contraire à ma philosophie de pensée.
"
Du côté du journal, on assure au Lab que la version publiée est au contraire fidèle à ce qui a été dit : "Bruno Bilde a bien parlé de Brexit au début de son propos, mais la phrase qui est rapportée a été prononcée plus tard. Le propos cité n'est pas tronqué." La citation telle que publiée est donc maintenue puisque, assure-t-on, les deux phrases en question ont bien été prononcées "d'une traite".
Il s'agit là d'un énième épisode dans la guerre ouverte entre La Voix du Nord et la majorité FN d'Hénin-Beaumont. Bruno Bilde explique d'ailleurs au Lab que le maire de la ville Steeve Briois est actuellement en train d'écrire un livre pour expliquer à quel point sa ville est "discriminée" par les journalistes de tous horizons. Ambiance…
En février dernier, Steeve Briois avait estimé que le quotidien était "désormais l’organe du Parti Socialiste, sans aucune ambiguïté et sans la moindre honte". En janvier, le journal s'était insurgé après qu'un journaliste a été qualifié de "maître dans l’art de la désinformation" dans le bulletin municipal d'Hénin-Beaumont.
Et les exemples sont encore très nombreux. En février 2015, Steeve Briois avait dénoncé les méthodes de La Voix du Nord qui consisteraient, selon lui, à "susciter le mécontentement au sein de manifestations ou de décisions prises par l’équipe municipale", en manipulant et tronquant les propos des habitants. En septembre 2014, quelques mois seulement après sa victoire aux municipales, le maire FN d'Hénin-Beaumont s'en était déjà pris au journal après sa défaite à la présidence du conseil de surveillance de l’hôpital local. En février 2016, La Voix du Nord avait affirmé avoir été refoulé d'une réunion publique par la mairie frontiste…
Le paroxysme avait, croyait-on, été atteint en décembre 2015 après la double une anti-FN du quotidien, juste avant les élections régionales. Marine Le Pen avait laissé entendre que, elle présidente de région, elle couperait les subventions allouées au quotidien local. Après le bon score du FN au premier tour des régionales, Steeve Briois s'était fait un malin plaisir de trollerLa Voix du Nord.
Au vu de l'épisode de ce 28 juin, il semble évident que tout cela est loin d'être fini.