François Baroin et Jean-François Copé déballent leurs rancœurs réciproques

Publié à 14h46, le 12 juillet 2013 , Modifié à 14h59, le 12 juillet 2013

François Baroin et Jean-François Copé déballent leurs rancœurs réciproques
François Baroin et Jean-François Copé le 28 janvier 2012 (Maxppp)

Habituellement, ce sont de petites phrases qui font le bonheur des pages "confidentielles" des hebdomadaires (et qui tiennent le haut du pavé sur Le Lab, ici, ici, ici, ou , par exemple).

Dans un long article (abonnés) de M, le magazine du Monde construit comme une pièce de théâtre, le journaliste Patrick Roger fait parler, sur un long format et "on the record", François Baroin et Jean-François Copé de leur relation orageuse, conflictuelle, et devenue, selon les mots du premier, "assez irréconciliable".

Dans cet article, officiellement consacré à la dislocation des "mousquetaires" de l’UMP - cette génération de quasi-quadras qui, pendant quelques années, s’est affichée comme unieau sein de l’UMP et qui est composée de Valérie Pécresse, Luc Chatel, Christian Jacob, Bruno Le Maire, François Baroin et Jean-François Copé - ce sont bien les deux derniers qui émergent comme les principaux adversaires.

Et c’est évidemment l’élection interne de l’UMP, à l'automne 2012, qui a achevé de les diviser, après de premières anicroches lorsque Nicolas Sarkozy était encore à l’Elysée.

Pour Jean-François Copé, François Baroin est ainsi vu comme celui "qui a poussé Fillon au-delà du raisonnable":

[François Baroin] n'a jamais accepté la moindre discussion, il ne répond pas au téléphone, il ne rappelle pas.

Il a été jusqu'au-boutiste, il a poussé Fillon au-delà du raisonnable.

Il était derrière toutes les positions les plus ultra, prêt à faire un parti.

Baroin qui refuse de répondre au téléphone à Copé ? Le maire de Troyes le confirme bien volontiers.

A l’été 2012, raconte-t-il, il était "en convalescence" après une opération. Coup de fil de Copé, qui lui enjoint de … le soutenir dans la bataille interne de l’UMP :

J'étais [...] à la campagne, Copé m'a laissé un message :

"On est chiraquiens, je suis pour les primaires avant la présidentielle.Maintenant, je veux que tu me soutiennes."

Je me suis demandé s'il se foutait de ma gueule.

Christian [Jacob] m'a laissé un ou deux messages. Je n'ai répondu ni à l'un ni à l'autre.

Hortefeux m'a laissé un message. Je n'ai pas plus répondu.

Pourquoi Baroin refuse-t-il obstinément de prendre son téléphone ? Parce qu’un certain Patrick Buisson, ex-conseiller de Nicolas Sarkozy à l'Elysée, avait fait son arrivée dans la #teamCopé. 

Voilà la version du maire de Troyes :

J'ai passé deux-trois coups de fil pour vérifier l'info sur Buisson ; on m'a confirmé qu'il avait effectivement un contrat.

Je suis revenu au bout de trois semaines. Et là, Copé a fait son truc sur le racisme anti-Blancs [ça, souvenenez-vous, NDLR].

J'ai pris mes distances, je l'ai annoncé.

Un peu plus loin dans l’article, Baroin maintient sa critique "de fond" contre Copé, et étend sa critique à La Droite forte, la motion créée par Guillaume Peltier et Geoffroy Didier, proches de Copé :

La rupture, elle est sur le fond d'abord, sur les idées que Copé porte, sur l'influence de Buisson, sur une doctrine à mon avis mortelle pour la droite.

Et puis sur le cynisme avec lequel il a orienté sa campagne pour flatter la partie dure des militants.

Le résultat, c'est une motion populiste qui a fait 30 %, un parti qui a explosé en plein vol et lui qui est en chute libre.

Avec Copé, c'est assez irréconciliable.

Voilà la rupture de "fond", donc.

Ce cadre posé n’empêche évidemment en rien François Baroin d’asséner des coups beaucoup plus directs, bien loin de toute bataille idéologique:

Ce que [Copé] a eu du mal à comprendre, et probablement à admettre, c'est que son leadership n'existe pas.

Par sa méthode, par son positionnement politique, il a échoué.

Ce qu'on pouvait accepter de Sarkozy devient inacceptable de la part de n'importe qui d'autre, à commencer par Copé.

La campagne de Copé, menée avec un cynisme et un aveuglement qui ont tiré tout le monde vers le bas, a été pitoyable.

De son côté, Copé, jure évidemment mordicus qu’il n’y a pas l’épaisseur d’une feuille de cigarette idéologique entre lui et Baroin.

Que tout cela, c'est uniquement une histoire d'orgueil ou de rancoeur mal digérés, mâtinée d'un zeste de folie personnelle:

J'ai compris maintenant : Baroin est un mec qui est dans le double langage.

Il fallait qu'il dise quelque chose alors il a inventé une histoire : la "ligne Buisson".

Que je sache, il a vécu plusieurs années au gouvernement sans jamais se poser de questions sur le fait que Patrick Buisson était le conseiller personnel du président de la République ; ça ne l'a pas empêché de prendre le maroquin et les lambris qui vont avec...

C'est quelqu'un qui est, je crois, profondément destructeur.

J'ai découvert à cette occasion qu'il était mû par une véritable haine, irrationnelle et, à certains égards, immature, puérile.

La suite ?

Devinez. Elle n'est évidemment pas la même en fonction de l'interlocuteur.

Pour Baroin, c'est absolument inévitable: entre eux, ça se règlera en face-à-face.

Peut-être qu'on pourra se retrouver, mais chacun portant son projet, qui devra être tranché par le corps électoral le moment venu.

Copé, lui, a déjà enterré Baroin, et jure qu'il ne pèse plus rien:

Aujourd'hui, [Baroin] a tout perdu.

Il a dissimulé sa traîtrise sous des apparences idéologiques, après avoir été capable de défendre exactement la ligne inverse.

La suite au prochain épisode ?

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