Le drôle d’argument du gouvernement pour justifier le report à 2017 du non-cumul des mandats

Publié à 17h01, le 04 avril 2013 , Modifié à 17h03, le 04 avril 2013

Le drôle d’argument du gouvernement pour justifier le report à 2017 du non-cumul des mandats

LE CHANGEMENT, C’EST EN 2017 – Le gouvernement l’a officialisé mercredi 3 avril en présentant le texte du projet de loi "interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur", la date d’entrée en vigueur du non-cumul sera le 31 mars 2017.

RIP donc 2014 et les revendications du Parti socialiste, ou les assurances données par Jean-Marc Ayrault lors de son discours de politique générale.

Pourquoi un tel report ? L’exécutif avance un argument juridique connu, celui du problème posé par un changement des règles en cours de mandat et un argument plus subjectif, celui… du temps d’adaptation des parlementaires et des citoyens.

 

  1. "Laisser aux parlementaires comme aux électeurs le temps de prendre en compte ce changement"

    Depuis ce mercredi 3 avril, c’est donc officiel : le non-cumul des mandats entrera en vigueur à partir du 31 mars 2017. 

    Le gouvernement, malgré la pression d’une partie du PS dont Harlem Désir, a donc définitivement enterré la promesse faite par Jean-Marc Ayrault lors de son discours de politique générale de l’appliquer dès les prochaines élections locales. RIP donc 2014.

    Pour se justifier, l’exécutif a d’abord mis en avant l’argument juridique. Ainsi, dans le compte-rendu du conseil des ministres du 3 avril, jour où le texte de loi a été présenté, on peut lire l’explication suivante :

    Ces dates permettent de ne pas remettre en cause la sincérité du scrutin et de ne pas fragiliser les textes par un effet rétroactif des dispositions relatives au remplacement, que le Conseil constitutionnel pourrait censurer.

    Dans le projet de loi organique enregistré le 3 avril à l’Assemblée nationale, et couplé à l’étude d’impact, cet argument de "la sécurité juridique du dispositif" est également développé :

    La modification des règles de remplacement constitue en effet une modification apportée à une situation en cours, tant pour l’électeur qui s’est prononcé sans avoir connaissance du fait que le remplaçant du sénateur pourrait être amené à remplacer le titulaire dans un nombre significatif de cas, que pour le remplaçant, qui voit s’étendre le nombre de cas dans lequel il peut être amené à siéger. 

    S’il n’apparaît pas que ces modifications soient d’une importance telle qu’elles puissent porter atteinte à la sincérité du suffrage, la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui invite à ne pas apporter de modifications au droit électoral en cours de mandat sauf à ce qu’il existe un motif d’intérêt général suffisant, a conduit le Gouvernement à retenir une date d’entrée en vigueur qui assure la sécurité juridique du dispositif. (…)

    Le choix opéré est d’aligner la date de l’entrée en vigueur de la limitation du cumul des mandats sur celle de la nouvelle règle de remplacement par le suppléant, en prévoyant que l’ensemble de la loi organique s’appliquerait à tout parlementaire à compter du premier renouvellement de l’assemblée à laquelle il appartient suivant le 31 mars 2017, c’est-à-dire en juin 2017 pour les députés, et en septembre 2017 pour les sénateurs.

    Ce que le gouvernement explique quant à lui en exposé des motifs du projet de loi :

    Le gouvernement souhaite toutefois que le parlementaire qui se trouve en situation de cumul et renonce à son mandat puisse être remplacé par la personne qui a été élue en même temps que lui.

    Autrement dit, et comme l’ont répété à plusieurs reprises Manuel Valls ou Claude Bartolone, la majorité s’assure ainsi d’éviter ce qui ressemblerait à "une mini-dissolution"à mi-mandat, qui serait évidemment défavorable à la majorité en place à l’Assemblée. Et plus encore au Sénat où la gauche ne dispose que d’une majorité toute relative. Ou quand l'argument juridique vient au secours de l'argument politique.

    MAIS…

    Le gouvernement avance un autre argument plus étonnant, sachant qu’une large majorité de Français se déclarent favorables à cette réforme instaurant un non-cumul strict entre une fonction parlementaire et un mandat exécutif local.

    Ainsi explique-t-il, en exposé des motifs du projet de loi, que la date de 2017 correspond au temps nécessaire pour que parlementaires et citoyens intègrent la réforme :

    Afin de laisser aux parlementaires comme aux électeurs le temps de prendre en compte ce changement important dans la législation relative au cumul des mandats, le Gouvernement a souhaité différer l’application de ces dispositions. 

    Ainsi, les nouvelles incompatibilités comme les dispositions relatives au remplacement d’un parlementaire démissionnaire s’appliqueront à tout parlementaire à compter du premier renouvellement de l’assemblée à laquelle il appartient suivant le 31 mars 2017.

    Ce texte, pour lequel le gouvernement a engagé la procédure accélérée, sera, selon Alain Vidalies, ministre des relations avec le Parlement, examiné à l’Assemblée nationale "à partir du 3 juin". Et devrait être adopté avant la fin de l’été 2013.

    Pour une application quatre ans plus tard.

     

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