Laurianne Deniaud (PS) : "J'ai toujours eu peur de perdre pied en m'éloignant du terrain"

Publié à 16h37, le 09 août 2012 , Modifié à 11h58, le 13 août 2012

Laurianne Deniaud (PS) : "J'ai toujours eu peur de perdre pied en m'éloignant du terrain"
Laurianne Deniaud, en avril 2012, aux côtés de François Hollande (Maxppp)

Le Lab continue sa série d’été sur les jeunes politiques à suivre dans les prochaines années, à l’UMP et au PS. Neuvième volet du côté du Parti socialiste, avec Laurianne Deniaud.

A 30 ans tout juste, Laurianne Deniaud vient d’être nommée chef adjointe du cabinet de François Lamy, le ministre délégué à la Ville. Une fonction au sein d’un gouvernement socialiste qu’elle a souhaité voir accéder au pouvoir depuis ses 18 ans.

Plongée dans le monde associatif, elle rejoint le Mouvement des jeunes socialistes (MJS) dans sa lutte contre les discriminations avant d’en prendre la tête en 2009. Comme Benoit Hamon ou Razzy Hamadi avant elle, la jeune femme grimpe vite après avoir mené les jeunes socialistes durant deux ans. Lors de la campagne présidentielle, on la voit parfois chauffer des salles avant les meetings de François Hollande. A ses côtés, elle prend la place de conseillère à la jeunesse.

Aujourd’hui, Laurianne Deniaud est tout à la fois membre d’un cabinet gouvernemental et secrétaire nationale du PS.

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  1. "25% de salaire en moins, vous trouvez ça normal ?"

    • > Quel est votre parcours ?

    J'ai fait une licence de droit à Nantes pour enchaîner sur une maitrise scientifique et technique en intervention et développement social. J'ai terminé avec un master pro en aménagement du territoire et développement local.

    Je me suis d'abord fortement engagée dans le monde associatif, notamment dans la fédération Léo Lagrange, avant d'aller vers le militantisme politique au MJS (mouvement des jeunes socialistes). J'y ai pris petit à petit des responsabilités, d'abord localement en Loire-Atlantique. J'y ai animé la fédération de Loire-Atlantique pendant les régionales de 2004, quand la région est passée à gauche.

    Je suis ensuite arrivée à Paris pour travailler en tant que chef de projet en politique de la Ville de l'Essonne ; Je m’occupais alors des quartiers populaires. C'est à Paris que mes fonctions au MJS ont pris une tournure nationale : j'en suis devenue la présidente entre 2009 et 2011.

    C'est mon premier bureau national du PS, où le président du MJS siège de droit, qui m'a le plus impressionnée. Je n'ai pas fait Sciences-po ou l'ENA, je ne connaissais pas du tout les leaders, ce n'est pas mon univers, mes parents ne font pas de politique... Je ne savais pas où m’asseoir ou comment prendre la parole !

    Puis la campagne est arrivée, j'étais conseillère jeunesse auprès de François Hollande. Il y a quelques mois, j'ai intégré le cabinet de François Lamy [ministre délégué à la Ville] sans quitter le terrain. Je m'occupe de la vie associative et de la lutte contre les discriminations.

    Pour ne pas risquer d'être suspectée de conflits d'intérêts, j'ai dû quitter la vice-présidence de la Fondation Léo Lagrange en mai.

    • > Pourquoi avez-vous décidé de faire de la politique ?

    Mon envie de m'engager remonte à mes 17/18 ans, lorsque, une fois mon Bafa en poche [diplôme d'animateur, ndlr], j'ai pu faire des colos et travailler au centre de loisirs sur mon temps libre. On y voit des enfants de classes sociales très différentes, ceux qui sont aidés par la Ville, ceux qui sont plus privilégiés... Ils n'ont pas les mêmes habitudes, les mêmes codes et les inégalités sociales sont prégnantes.

    Au départ je ne me suis pas tournée vers la politique mais vers le monde associatif, notamment via la fédération Léo Lagrange. Je faisais des interventions dans les écoles pour parler de la discrimination de genre et de couleur de peau. Et à un moment, mon engagement associatif a croisé un combat politique, celui des jeunes socialistes qui faisaient justement campagne contre les discriminations sexistes. Je me souviens de leur affiche : "25% de salaire en moins, vous trouvez ça normal ?"

    Ca m'a donné envie de les accompagner, sans lâcher l'associatif. J'ai toujours eu peur de perdre pied en m'éloignant du terrain.

    Je fais aussi partie de cette génération marquée par le 21 avril 2002 - la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle - et par les émeutes des quartiers de 2005.

    • > Avez-vous un mentor en politique ?

    Mentor c'est un grand mot ! Il y a des personnes qui ont fait mon engagement, comme les femmes de ma famille qui, sans le vouloir, mon transmis un combat féministe. Elles sont toujours restées debout malgré les difficultés.

    Dans la classe politique actuelle, François Hollande est une figure politique, car il a gagné et ça n'était pas arrivé depuis trop longtemps !

    Martine Aubry m'impressionne par sa capacité à ne rien lâcher, parce qu'elle a transformé le PS en profondeur et pour la durée.

    Je ne veux pas oublier Ségolène Royal qui - et elle a souvent été décriée pour ça - a eu une capacité à sentir les choses et à les faire bouger.

    Et puis Benoit Hamon est quelqu'un de très important pour moi, avec qui j'ai commencé mon parcours politique. Je me retrouve dans ce qu'il dit, il a une force de conviction énorme. Je suis d'ailleurs signataire de la contribution d'Un monde d'avance [courant de l'aile gauche du PS dont fait partie Benoit Hamon].

    • > Pour vous, c'est quoi être de gauche ?

    La gauche est, et doit être, toujours plus une force de changement dans la société qui ne doit pas se limiter à la gauche institutionnelle et politique. Elle doit faire des ponts avec ceux qui font la société au quotidien.

    Par exemple, sur le mariage pour tous : l'autoriser va lever des mécontentements, on aura besoin d’une société civile organisée pour pousser avec nous.

    • > Quelle est votre présence numérique ?

    J'ai un compte Twitter , Facebook et un blog  que j'utilise par phase : ces trois derniers mois par exemple, j'ai dû les abonner un peu à cause de mes nouvelles fonctions. Mais je fais partie de cette génération qui, lorsque je me lève, prend son smartphone pour regarder Facebook et Twitter.  Je n’y réfléchis même plus !

    Je ne suis pas du genre à envoyer 40 tweets par jour ! Je n'y raconte pas non plus mes vacances. Mais quand j’ai besoin de faire passer une idée, c’est assez naturel pour moi d’aller sur les réseaux sociaux. Ca demande également de s'y tenir pour répondre aux gens.

    Selon moi, Twitter permet d'être plus en interaction avec les autres alors que Facebook est plus individualiste. Je le vois davantage comme un moyen de diffusion.

    Twitter donne plus de transparence à la vie politique. Bien sûr, on doit faire attention à ce qu'on y dit, mais les politiques devraient toujours faire attention à leurs propos.

    • > Où vous voyez-vous dans quinze ans ?

    J'ai passé ces derniers mois à réorganiser ma vie, y compris entre Saint-Nazaire - ma ville d'origine - et Paris. Donc dans quinze ans je n'en sais rien du tout !

    Je n'ai en tout cas jamais caché que j'étais prête à prendre des responsabilités, en étant pourquoi pas confrontée à l'élection. Mais c'est un moyen comme un autre d'agir, de faire avancer mes idées. On peut être utile à plein d'endroits et je n'ai pas de plan défini.

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