L'idée d'une suppression du Sénat refait surface, à deux jours des élections sénatoriales

Publié à 16h01, le 26 septembre 2014 , Modifié à 17h03, le 17 octobre 2014

L'idée d'une suppression du Sénat refait surface, à deux jours des élections sénatoriales
De gauche à droite et de haut en bas : Alexis Bachelay, Jean-Christophe Fromantin, Daniel Cohn-Bendit et marine le Pen © Reuters - MaxPPP / Montage Le Lab

NOBLE ASSEMBLÉE - À deux jours des élections sénatoriales, les attaques se multiplient contre la haute assemblée. Inutile, conservateur par définition, manque de représentativité, "chambre d'enregistrement" de textes votés par les députés, réticence à faire lumière sur l'utilisation de la réserve parlementaire : les arguments ne manquent pas pour ressortir la vieille idée de supprimer - ou à tout le moins de réformer - le Sénat. Et sur la question, les clivages politiques tendent à s'effacer.

# À gauche

Jeudi 25 septembre, le député PS Alexis Bachelay, membre du courant "Cohérence Socialiste" (qui veut également supprimer la fonction de Premier ministre), estimait sur France Inter que "le Sénat est un peu enkysté par son mode d'élection: c'est une assemblée de notables." Et l'élu des Hauts-de-Seine confie sa "déception" devant le manque d'apport de l'institution de la rue Vaugirard :

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Je suis très déçu en tant que député de constater qu'il n'y a pas de vrai débat ni d'enrichissement des textes entre le Sénat et l'Assemblée.



[...] On ne comprend pas à quoi sert la chambre haute, notamment par rapport à son mode d'élection et de représentation. Elle est censée représenter la France rurale du XXème siècle, et la France a bien changé. D'autre part, le mode d'élection indirect, à savoir un collège d'élus essentiellement, ne permet pas sur le plan démocratique de représenter de manière satisfaisante ni la diversité politique ni la diversité des territoires.

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Si le Sénat n'est pas purement et simplement supprimé, le collectif "Cohérence Socialiste" propose a minima de le réformer en profondeur : le transformer en "conseil des régions" et faire élire ses membres au scrutin direct et proportionnel (ils sont aujourd'hui élus par des "grands électeurs", au scrutin indirect).

En janvier, déjà, Alexis Bachelay expliquait sur Twitter qu'il ne "s’émouvrait" pas d'une disparition du Sénat, qui venait alors de refuser de supprimer l'immunité parlementaire du sénateur UMP Serge Dassault (elle sera finalement levée en février). L'idée de cette suppression suscite toutefois l'ironie du sénateur UMP Roger Karoutchi, fervent défenseur de son institution :

Mais au PS, l'idée n'est pas nouvelle : "l'anomalie parmi les démocraties", pointée du doigt par Lionel Jospin en 1998, est de ces formules passées à la postérité.

>> À lire sur Le LabQuand les députés socialistes s’attaquent au Sénat, "le triangle des Bermudes"

# Au centre

Au centre aussi, l'idée en séduit certains ces derniers jours. Jean-Christophe Fromantin, candidat à la présidence de l'UDI, propose ainsi une réforme constitutionnelle, comme le rapporte Challenges : "Suppression du Sénat, proportionnelle à l'Assemblée..."

# Daniel Cohn-Bendit le "gaulliste"

Même Daniel Cohn-Bendit souhaite une réforme de la haute assemblée. Sur Europe 1 ce vendredi, l'ancien eurodéputé écolo se dit même "gaulliste" pour justifier sa position, reprenant à son compte la critique du Général sur le Sénat :

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Je suis gaulliste parce que le premier qui a tapé sur le Sénat, quand même, c'est de Gaulle. Et en 69, il a été viré parce que les Français ont dit 'non' mais la proposition de réforme qu'il avait du Sénat allait dans la bonne direction.

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Daniel Cohn-Bendit propose d'en faire une "chambre des régions" - qui aurait notamment une compétence supérieure à celle de l'Assemblée nationale sur la décentralisation - mais aussi la "chambre de l'Europe".

Le 28 avril 1969, le grand Charles avait démissionné de ses fonctions de président de la République après l'échec du référendum sur la réforme des régions et la transformation du Sénat.

# Jean-Pierre Raffarin VS Christophe Barbier

Le débat donne même lieu à des joutes entre politiques et éditorialistes. Cette semaine, L'Express s'est fendu d'une enquête de neuf pages sur les "scandaleux privilèges" des sénateurs. Le sang de Jean-Pierre Raffarin, qui brigue la présidence de la haute assemblée, n'a fait qu'un tour : le sénateur de la Haute-Vienne a écrit jeudi une lettre à Christophe Barbier, directeur de la rédaction de l'hebdomadaire, dénonçant une "perception inexacte, injuste et même caricaturale" de la noble institution :

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La suppression du Sénat serait un coup dur pour notre République.

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# Marine Le Pen aussi

À la suite du vote polémique sur l'immunité parlementaire de Serge Dassault en janvier dernier, Marine Le Pen avait elle aussi plaidé pour une suppression de la seconde chambre. "Je pense que dans des temps extrêmement difficiles, où il y a une inflation d'élus, je ne vois pas plus bien à quoi sert aujourd'hui le Sénat", expliquait la présidente du FN. Et de poursuivre :

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Je rappelle d’ailleurs qu’il y a des pays qui ont opéré la suppression de leur deuxième chambre. Je pense il y a une trentaine d’année ou une quarantaine d’année à la Suède, car ces pays considéraient que cette double chambre n’était pas un plus sur le plan démocratique mais en réalité un moins.

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Dimanche 28 septembre, 178 des 348 sièges de sénateurs seront remis en jeu. La droite devrait selon toute logique reconquérir la majorité, après l'historique passage à gauche de 2011.

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