TIR GROUPÉ - "L'exaspération" est semble-t-il réciproque. Certes, on "aime l'entreprise" jusqu'au plus haut sommet de l'État, mais les relations entre l'exécutif et Pierre Gattaz sont de plus en plus tendues, au lendemain de la mobilisation de plusieurs milliers de patrons, à Toulouse et Paris, contre 30 ans d'une "politique qui a progressivement étouffé les entreprises".
Le président du Medef a lancé cette semaine de contestation, lundi 1er décembre sur Europe 1, en dénonçant le "ras-le-bol" et l'"exaspération terrible" des chefs d'entreprise, "asphyxiés par les charges". Mais voilà, le gouvernement aussi en a un peu "ras-le-bol" de Pierre Gattaz. Déjà qualifié de "premier opposant au gouvernement" par Jean-Christophe Cambadélis, ce dernier a de nouveau été pris pour cible par deux ministres qui l'ont notamment appelé à la "responsabilité", mardi 2 décembre en direct à la radio.
Mais cela fait en réalité plusieurs mois que les critiques à son égard se multiplient, de la part d'à peu près tout le monde au gouvernement.
# Décembre : Macron, Le Guen, Valls
C'est Emmanuel Macron, ministre de l'Économie, qui a ouvert le feu sur Radio Classique. Pour le chouchou de François Hollande, le patron des patrons n'est pas exempt de tout reproche quant aux résultats de la politique économique du gouvernement :
"Je n'ai pas à qualifier l'attitude de Pierre Gattaz, j'ai juste à dire que dans "pacte de responsabilité", il y a le mot "responsabilité". Aujourd'hui, il y a très peu d'accords de branches qui sont signés, c'est un échec et c'est aussi le sien. L'État a pris ses responsabilités et donc je crois qu'aujourd'hui, l'urgence pour le patronat ce n'est pas de réclamer plus, c'est de prendre sa responsabilité avec un dialogue social efficace.
"
La deuxième rafale est venue quelques minutes plus tard, tirée par Jean-Marie Le Guen sur France Info. Le secrétaire d'État aux Relations avec le Parlement s'en est surtout pris au discours du président du Medef :
"Ce que nous attendons du Medef, c'est qu'il prenne ses responsabilités pour tirer l'économie vers le haut. On voudrait aussi qu'on arrête un peu le fameux french bashing [...]. Tous les Français et en particulier les responsables ne peuvent pas simplement être dans le dénigrement et le misérabilisme.
J'attends de monsieur Gattaz qu'il prenne en considération que ses commentaires ont un effet sur l'économie et à partir du moment où il y a eu un accord, qu'il le respecte en tirant le pays vers le haut, en appelant les patrons à s'engager pour la croissance, pour le développement de l'emploi.
"
C'est aussi une certaine "théâtralité dans les relations sociales" que Jean-Marie Le Guen avait dans son viseur. Cette double attaque fait suite à celle de Manuel Valls lui-même, lundi. En marge d'un déplacement à Nantes, le Premier ministre a fustigé les "provocations" et les "caricatures" des "dirigeants du patronat" :
"Je voudrais que les dirigeants du patronat, que je ne confonds pas avec les dirigeants d'entreprise, se montrent un peu plus solidaires et un peu plus responsables. [Ces dirigeants du patronat sont] même parfois dans la provocation, par exemple en remettant en cause le Smic ou le fait de justifier les licenciements.
Nous n'avons pas besoin de dirigeants du patronat qui soient dans le corporatisme, qui soient dans la caricature, et qui en demandent toujours plus, alors qu'ils reçoivent beaucoup de la Nation, et qu'on attend des contreparties qui se négocient et qui se négocient trop lentement.
"
Référence *légèrement* énervée au million d'emplois un temps promis par Pierre Gattaz en échange des allègements de charge pour les entreprises, décidés par le gouvernement. Et d'appeler le président du Medef à "ne pas céder à une approche partisane".
# Novembre : Le Foll, Rebsamen
Mais ce n'est pas fini. Dimanche soir, c'est le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, qui s'en était pris à Pierre Gattaz :
"Oui, il y a un problème Gattaz.
"
Et quand y'en a plus, y'en a encore. Début novembre, François Rebsamen avait qualifié de "petit syndicaliste" qui "nuit à l'image de l'entreprise" celui avec qui il est censé construire le dialogue social. Le ministre du Travail s'était ensuite excusé de l'emploi de cette formule "vexante pour les syndicalistes".
# Juillet : François Hollande
Même François Hollande avait fait part de son énervement au sujet de Pierre Gattaz, au mois de juillet devant l'association de la presse présidentielle :
"Il y a un problème de langage, ce langage-là doit changer. Il y a un problème d'expression qui peut avoir des conséquences économiques.
"