Comment la sortie de Cécile Duflot sur les Roms a ruiné la visite de François Hollande à Florange

Publié à 20h44, le 26 septembre 2013 , Modifié à 10h01, le 27 septembre 2013

Comment la sortie de Cécile Duflot sur les Roms a ruiné la visite de François Hollande à Florange
Discours de François Hollande, jeudi 27 septembre, devant la direction et les cadres d'ArcelorMittal. (Paul Larrouturou/Le Lab)

REPORTAGE - Il est 15h45, ce jeudi 26 septembre. Les conseillers de François Hollande font de gros efforts pour masquer leur soulagement et leur satisfaction. La périlleuse visite du chef de l'État, balisée au millimètre, est un succès.

Mis à part les quelques sifflets entendus à l'arrivée du cortège de voitures du chef de l'Etat sur le site Grands-Bureaux de Florange à 9 heures, et quelques bruyants militants anti mariage pour tous tenus à l'écart de la préfecture, aucun véritable incident n'est à déplorer et la double annonce du chef de l'Etat - la création d'un centre de recherche à Florange et la promesse, improvisée sur place, de revenir tous les ans - provoque une réaction prudente mais positive des principaux leaders syndicaux.

Il est 15h45. Jusqu'ici, tout va bien. François Hollande a presque fini sa tournée en Lorraine. Il a également visité le site Sainte Agathe, animé une table ronde sur le "pacte Lorraine"à la préfecture de Metz et déjeuné avec l'ancien Premier ministre  luxembourgeois Jean-Claude Juncker. Il ne lui reste plus que la visite d'une usine de canettes, à Pompey, en Meurthe et Moselle. Le plus dur est passé, pense l'Elysée.

Et là, c'est le drame. La caravane présidentielle est percutée de plein fouet par les déclarations fracassantes de Cécile Duflot. Dans les deux bus et les voitures de journalistes qui suivent le cortège présidentiel, les smartphones vibrent, les boîtes mails s'affolent, une symphonie de SMS se fait entendre :  la ministre du Logement conteste frontalement la ferme ligne du ministre de l'intérieur sur les Roms.

Et elle en appelle au chef de l'Etat :

Quand on dit ça, on est au-delà de ce qui met en danger le pacte républicain. [...]

Je le dis parce que c'est simplement la vérité et que quand on disait la même chose, et c'est là l'obligation de cohérence. [...]

Et ça, c'est la responsabilité du Président de la République.

Dès lors, progressivement, les journalistes comprennent que leurs rédactions sont désormais plus intéressées par cette nouvelle ligne de fracture béante au sein du gouvernement sur le dossier Roms que par le compte-rendu de cette visite qui s'est révélée, contre toutes attentes, un succès. Et les conseillers du président vont rapidement faire leur deuil de la réussite de cette escapade dans l'Est.

En quelques secondes, plus personne ne s'intéresse vraiment à la visite. La majorité des journalistes sortent pendant le discours du chef de l'Etat devant les salariés de l'entreprise, afin de recueillir à l'extérieur la réaction d'Aurélie Filippetti, seule ministreà accompagner le chef de l'Etat.

La ministre de la Culture commence par assurer "fièrement" le service après-vente des annonces du chef de l'Etat dans le dossier Florange qu'elle suit depuis des années en tant qu'ancienne député de Moselle. Elle aimerait ne parler que de ça. Mais c'est impossible.

Elle condamne ensuite clairement le timing de la sortie de Cécile Duflot en regrettant que ses déclaration viennent polluer la dominante politique du jour que voulait imposer l'Elysée, Florange :

Il faut respecter ces travailleurs [...] cela veut dire aussi respecter la parole du président.

Mais qu'en pense, justement, le chef de l'Etat qui déambule entre des montagnes de canettes vides multicolores?

 

(Paul Larrouturou/Le Lab)

Avant de pouvoir réagir, encore-faut-il qu'il soit au courant. Les journalistes informent ses conseillers. "Qu'est-ce qu'elle a dit ? Non ?! Ce n'est pas opportun...", lâche un très proche collaborateur du chef de l'Etat en découvrant une retranscription des propos de la ministre du Logement sur un BlackBerry en surchauffe.

Une fois Francois Hollande averti, impossible d'échapper aux questions convergentes de la cinquantaine de journalistes qui veulent obtenir un arbitrage du sommet de l'exécutif entre les lignes Valls et Duflot.

L'entourage du président de la République défend un savant dosage entre "fermeté et humanité", assure qu'il n'est "pas possible que la Bulgarie et la Roumanie rentrent dans l'espace Schengen dans les conditions actuelles" et refuse de départager, à chaud, les deux ministres : 

 Le chef de l'État n'est pas là pour commenter les phrases des uns ou des autres.

L'Elysée a été forcé de réagir sur les Roms. La photographie de la poignée de main entre Edouard Martin, le leader CFDT de Florange et Francois Hollande a jauni instantanément. 

Réédité à 9H30, ce vendredi matin, avec ajout de liens et de photos

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