NON CENSURÉ - C'est un débat pour la forme auquel les députés se sont adonnés, jeudi 19 février. Si le gouvernement n'a pas été renversé, le dépôt d'une motion de censure n'en reste pas moins un fait rare du jeu politique français.
Sans surprise, cette motion n'a pas été adoptée, recueillant 234 voix "pour". Il en fallait au moins 289, soit la majorité absolue, pour pousser le gouvernement à la démission. Déposée par 109 parlementaires UMP et UDI, la motion a reçu le soutien de la totalité des 198 élus UMP, 23 UDI (sur 30), 6 députés du Front de Gauche (sur 15) et 6 non-inscrits sur 9 (dont les deux FN), mais aucun écologiste (Sauf Isabelle Attard de Nouvelle Donne) ou socialiste n'a voté en sa faveur. En conséquence, la loi Macron est officiellement "adoptée" par l'Assemblée, avant d'être discutée au Sénat.
Le détail complet des votes est à retrouver à la fin de cet article.
Il y avait certes peu de suspense quant à l'examen de la motion de censure contre le gouvernement, déposée par l'UMP et l'UDI en réponse au recours au 49.3 pour faire adopter la loi Macron en force. Mais il n'est pas anodin de voir se succéder à la tribune, comme ce fut le cas de 16 heures jusqu'au vote à partir de 18h15, les présidents des six groupes politiques de l'Assemblée sur cette question. Avant le vote, Manuel Valls himself a répondu aux patrons des groupes.
Ce live est maintenant terminé. Le Lab vous propose de retrouver ci-dessous ses instants choisis de cette tranche de vie parlementaire.
# Je peux pas, j'ai discours
C'est François Hollande qui, malgré tout le mal qu'il a pu dire du 49.3 par le passé, a autorisé mardi le Premier ministre à engager la responsabilité du gouvernement sur la loi Macron. Mais le chef de l'État loupera au moins le début du débat sur la motion de censure. Il est en effet à Istres pour prononcer un discours (attention ironie de l'histoire) "sur la dissuasion nucléaire" :
Le président @fhollande est à Istres cet après-midi pour prononcer un discours sur la dissuasion #nucléaire#DirectPRpic.twitter.com/Azc2PdDxi5
— Élysée (@Elysee) 19 Février 2015
# Ayrault, lui...
Après l'introduction de Claude Bartolone, Christian Jacob prend la parole en premier pour l'UMP. Et il attaque d'emblée Manuel Valls, se fendant d'un petit rappel historique :
"Vous avez succédé [à Matignon] à monsieur Ayrault. Vous le disiez usé, mais lui a pu compter jusqu'au bout sur la confiance de sa majorité.
"
Le patron des députés UMP enchaîne, toujours à l'adresse du Premier ministre : "Vous tombez sur la petite loi Macron. Cette loi qui se situe entre pas grand chose et rien du tout". "Vous humiliez vos troupes" avec le recours au 49.3, attaque-t-il encore, avant de lancer :
"Le 49.3, c'est l'arme qu'utilisent les faibles, et vous êtes faible, monsieur le Premier ministre.
"
Pendant ce temps, Manuel Valls, impassible, consulte ses dossiers :
# Sarkozy, lui...
Autre référence de Christian Jacob pour moquer le passage en force du gouvernement : Nicolas Sarkozy. Le député de Seine-et-Marne fait mine de s'interroger :
"Avez-vous oublié qu'il y a trois ans la France avait un président de la République respecté ? Avez-vous oublié qu'elle avait une majorité et qu'il n'y a jamais eu besoin ici de brutalité ?
"
# Absentéisme
Sur ce plan large pris durant l'intervention de Philippe Vigier (UDI), on peut s'apercevoir que les bancs de la gauche sont quelque peu clairsemés :
D'ailleurs, chez les frondeurs, seuls Jean-Marc Germain et Pouria Amirshahi sont présents, d'après une journaliste d'iTÉLÉ :
Ils ne sont que 2 frondeurs rescapés sur les bancs du PS : @jmgermain et @PouriaAmirshahi#MotionDeCensure
— Camille Langlade (@CamilleLanglade) 19 Février 2015
C'est un peu plus rempli à droite :
# Passion archives
Philippe Vigier explique qu'il a "relu" le dernier discours de politique générale de Manuel Valls, dans lequel celui-ci disait vouloir "réformer" et "avancer". "Vous ne le pouvez plus aujourd'hui", affirme le patron des députés UDI. Ce qui fait bien rigoler le Premier ministre :
# Et ils sont où, et ils sont où les frondeurs ?
Philippe Vigier s'en prend aux élus de gauche opposés à la loi Macron, "les archaïques qui refusez de voir que le monde a changé, qui voulez construire la France de demain sur les postures, sur les slogans". Mais, comme Xavier Bertrand à l'UMP, il les appelle également à voter la censure du gouvernement. Et d'argumenter :
"Ce gouvernement vous a trahi.
"
# Pour nous, c'est oui
Pour les radicaux de gauche (PRG), Roger-Gérard Schwartzenberg soutient le gouvernement :
"Nous faisons confiance au Premier ministre et au gouvernement pour continuer à agir.
"
# SOUTINE
François De Rugy fait partie des écologistes qui souhaitent un retour des Verts au gouvernement. Aussi, le co-président du groupe EELV ne s'en prend pas trop violemment à l'exécutif. S'il considère que le recours au 49.3 est "une impasse", le député écolo ne résume pas cet échec au seul gouvernement :
"L'impasse, c'est toute la majorité qui y est engagée, et c'est la majorité dans son ensemble qui doit trouver en son sein le moyen d'en sortir pour conduire d'autres changements d'ici à 2017.
"
De Rugy se veut pragmatique : "Faisons qu'à quelque chose malheur soit bon", poursuit-il au sujet du vote sur la censure. Il ajoute, reprenant certains éléments de langage de l'exécutif :
"Cela permettra de mesurer qu'il n'y a pas de majorité alternative. Et cela permettra de définir, en comptant ceux qui refusent d'y apporter leurs voix, les contours de ce qu'est la majorité.
"
À laquelle les Verts appartiennent toujours, donc.
# CALM DOWN
François De Rugy annonce logiquement que les députés EELV ne voteront pas la motion de censure. Brouhaha sur les bancs de la droite. C'est alors Claude Bartolone qui tente de calmer les esprits :
"Cachez votre déception, monsieur Poisson !
"
L'intéressé, quelques minutes plus tard :
# A star is born
Le communiste André Chassaigne s'est fait remarquer par sa gouaille durant le débat sur la loi Macron. Il a même, avec d'autres élus du Front de Gauche, tenté en vain de déposer sa propre motion de censure. C'est donc naturellement que, lorsqu'il est appelé au micro, un certain frémissement se fait sentir. Alors que le patron des députés GDR se dirige vers le pupitre, on entend dans l'hémicycle :
"Aaaaaaaaah !
"
Une fois l'orateur installé, jaillit des bancs un encouragement :
"Allez André !
"
# Liberté
André Chassaigne fustige la loi Macron qui ne comporte "aucune mesure sociale". Il demande de "prendre en compte l'humain, l'humain d'abord, l'humain avant tout". Il poursuit son réquisitoire contre la politique de l'exécutif et lance :
"Nous refusons ce chantage politique, tant notre parole est libre.
"
Et de prendre Manuel Valls à partie : "Vous ne pourrez ad vitam masquer votre rapprochement avec la droite par des envolées verbales trompeuses."
# Le Roux Vs Jacob
Bruno Le Roux convoque "l'esprit du 11 janvier" dans les débats. Le patron des députés socialistes est légèrement chahuté par la droite, et s'adresse directement à son homologue de l'UMP, visiblement agacé. Bruno Le Roux propose ironiquement à Christian Jacob de "remonter plus tard à la tribune pour enfin dire quelque chose de sensé à l'attention des groupes politiques". "Vous avez laissé passer votre tour, daignez qu'on puisse s'exprimer", dit-il encore.
Le gouvernement approuve ce message :
# "Péripétie parlementaire"
"Ce soir, quand nous voterons contre cette motion de censure, nous clôturerons cette péripétie parlementaire", poursuit Bruno Le Roux. Il en profite pour affirmer que la loi Macron a fait l'objet de l'une des plus grande "coproductions [entre le gouvernement et les députés] de l'histoire de la Vè République". Il "félicite" et "remercie" également Emmanuel Macron pour son travail en commission et dans l'hémicycle.
Le ministre de l'Économie boit ses paroles :
# Macron le moderne
Il y a quelques temps, Manuel Valls voulait en terminer avec "la gauche passéiste". Durant son intervention avant le vote sur la censure, le Premier ministre rend hommage à Emmanuel Macron, dont il a salué "l'action, la modernité, le sens de l'écoute".
# 11 janvier
Manuel Valls revient sur "l'esprit du 11 janvier", que l'exécutif invoque systématiquement depuis les attentats qui ont frappé la France. Il explique que "ce n'est pas un esprit magique et insaisissable que l'on évoque fébrilement". C'est, à son sens, "d'abord une exigence collective, celle des Français". "L'exigence d'être à la hauteur, y compris dans cet hémicycle dans les comportements, parce que les Français nous regardent."
# Voilà, c'est fini
Les députés sont appelés à voter. Seuls ceux désirant approuver la motion de censure peuvent déposer leur bulletin dans l'urne, dans les salles attenantes à l'hémicycle. Les votes "contre" ne sont donc pas comptabilisés, ni les abstentions. La séance est suspendue, rendez-vous à 18h50 pour le résultat du vote.
# Le détail des votes
L'analyse complète du scrutin est disponible sur le site de l'Assemblée nationale.
La totalité des 198 députés UMP a voté "pour" la motion.
Sept des 30 députés UDI n'ont pas voté la motion.
Six des 15 élus Front de Gauche ont voté "pour".
Aucun des 17 élus EELV n'a voté la motion, mais l'apparentée Isabelle Attard (Nouvelle Donne) a voté "pour".
Six des neuf non-inscrits (dont les deux FN) ont voté "pour".
Aucun socialiste n'a voté "pour".
Aucun des Radicaux de gauche n'a voté "pour".